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LES ATMOSPHÈRES DES PLANÈTES.

de neige, de gelée blanche ou de glace, et, lorsqu’il s’évaporerait ensuite, s’écoulerait, à cause de sa densité, le long des vallées, occupant les plaines et poussant son chemin au-dessous de l’azote. Les brumes, les neiges, les gelées en seraient les manifestations, et son écoulement de part et d’autre des chaînes de montagnes expliquerait les aspects que l’on a pris pour des canaux. Ceux-ci seraient des chaînes dominant le brouillard d’acide carbonique.

Nous allons examiner en détail la savante théorie du physicien anglais.

ccxxxviiiLa théorie cinétique de la conservation des atmosphères.

La théorie développée par M. Johnstone Stoney semble permettre, à première vue, de résoudre par le calcul toutes les questions relatives à la conservation et à la composition des atmosphères planétaires, si l’on connaît seulement l’intensité de la pesanteur à leur surface et les températures qu’elles ont traversées dans le cours du temps. Elle est basée en entier sur la théorie cinétique des gaz et sur la connaissance de la vitesse que devrait posséder un corps se mouvant librement dans l’espace, pour sortir de la sphère d’attraction de la planète et l’abandonner définitivement.

Or, la théorie cinétique des gaz nous donne, pour chacun d’eux, la vitesse moyenne de leurs molécules et la loi suivant laquelle les diverses vitesses se répartissent entre l’ensemble de leurs ultimes particules. Elle établit des relations entre la vitesse moyenne et la température, ou la masse moléculaire, la valeur du chemin parcouru en moyenne par une molécule entre deux chocs consécutifs ; bref elle nous fournit, en apparence, tous les éléments du problème que M. Johnstone Stoney s’est proposé de résoudre. Cette considération individuelle de la molécule transforme le problème de Laplace en un simple problème de mécanique particulaire, dont la solution apparaît, à première vue, comme facile à découvrir. Nous verrons cependant que ce problème cache encore des difficultés très grandes, et que la théorie cinétique, qui n’est pas démontrée, mais qui est acceptable par le grand nombre de faits qu’elle permet d’expliquer, devient douteuse précisément pour son application au problème qui nous intéresse ici. Nous allons en résumer les principes.

Théorie cinétique des gaz. — Cette théorie envisage les gaz comme constitués par des sphères élastiques se mouvant en tous sens avec une grande vitesse, s’entrechoquant et rebondissant les unes sur les autres, frappant les parois des vases qui limitent la masse gazeuse, et produisant ainsi, par ces chocs multiples et sans cesse répétés, la pression que les gaz exercent sur leur enveloppe, et