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DU LIGONDÈS. — LA CONSTITUTION PHYSIQUE DE MARS.

clarifie… L’atmosphère paraît claire au-dessus des mers intérieures pendant les mois qui suivent immédiatement le solstice austral ». Or, les « mers intérieures » sont presque toutes dans l’hémisphère austral, et c’est précisément après le solstice d’été de cet hémisphère que le sol doit y être le plus échauffé par les rayons du Soleil.

Tous ces changements s’accordent parfaitement avec notre hypothèse que les taches sombres de Mars sont produites par une végétation puissamment développée, grâce à l’humidité tiède montant du sol meuble. Il est d’ailleurs un phénomène qui vient confirmer notre théorie de l’origine souterraine, ou pour mieux dire sous-martienne, des brumes qui voilent quelquefois les régions sombres de Mars. Nous voulons parler du prolongement, par une demi-teinte gris clair, des canaux à travers ces mêmes régions. Ces prolongements sont surtout visibles lorsque les canaux apparaissent élargis ou dédoublés, c’est-à-dire lorsqu’ils doivent être enveloppés d’une buée qui rend leur observation difficile et leur mise au point très incertaine. Si, comme nous le croyons, les « mers » correspondent aux régions de la surface sillonnées par les fines cassures du début, et si les canaux nous montrent l’emplacement des crevasses plus récentes, formées après l’épaississement de l’écorce, ces crevasses se prolongent nécessairement à travers les « mers », et l’humidité qui s’en échappe doit se condenser au-dessus de ces prolongements, comme elle le fait le long des canaux proprement dits.

Un autre caractère de certaines taches de Mars est l’instabilité des contours. Plusieurs changements, tels que le glissement du lac Mœris vers la grande Syrte, et la disparition lente de l’Aurea Cherso dans le golfe de l’Aurore, ont été observés d’une façon indubitable depuis quelques années. D’aussi grandes déformations dans ce qu’on appelle les « rivages » prouvent que le sol de Mars manque de consistance, qu’il est apparemment sablonneux comme le Sahara, sur les plateaux, et marécageux dans les vallées. Toutes ces constatations tendent à nous confirmer dans l’idée que la surface de la planète est composée de matériaux plus ou moins spongieux.

N’avons-nous pas d’ailleurs, plus près de nous, dans la Lune, un exemple frappant de la perméabilité des matériaux de certains corps célestes ? Suivant MM. Lœwy et Puiseux, dont la compétence sur les questions lunaires est indiscutable, quelle que soit la théorie cosmogonique à laquelle on se rallie, on ne peut voir dans la Lune autre chose qu’une sorte d’extrait de la Terre. Les éléments qui ont contribué à la formation de la Terre doivent donc se retrouver aussi sur la Lune, mais, en raison de la pesanteur plus faible là qu’ici, l’agglomération des matériaux est moindre, leur densité moyenne est plus faible (3,38 au lieu de 5,55) et ils ne forment pas des roches aussi compactes que celles de l’écorce terrestre. La preuve de ce fait géologique se voit dans la configuration de la surface lunaire. Il est probable, il est même certain qu’il y a eu autrefois de l’eau sur la Lune ; cependant, nulle part on ne voit trace de ces érosions avec lesquelles nous a familiarisés l’aspect des montagnes terrestres. Les eaux