Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 2, 1909.djvu/376

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
368
LA PLANÈTE MARS.

n’est pas surprenant de voir leur densité rester inférieure à 3. Leur structure poreuse les rend évidemment perméables à l’eau. Cette perméabilité du sol martien, jointe à sa constitution métallique, lui permet de se laisser facilement traverser par la chaleur venant de l’intérieur. Les couches superficielles de Mars ne forment pas, comme l’écorce terrestre, une enveloppe compacte, à peu près impénétrable pour les liquides, isolant presque entièrement de l’extérieur le noyau métallique en fusion. Sur Mars, l’eau peut descendre jusqu’à une grande profondeur dans le sous-sol et permet un échange continu de calorique entre l’intérieur et la surface. Ces échanges se font naturellement par les anciennes fissures de l’écorce, aujourd’hui, sans doute, comblées par les éboulis, mais restées néanmoins plus perméables que les autres parties. La chaleur de surface, qui se dissipe incessamment par l’effet du rayonnement nocturne, peut donc se renouveler, en partie, aux dépens du noyau central. Grâce à l’appoint diurne fourni par le Soleil, la température de la planète se maintient encore à un degré assez élevé pour permettre, au moins dans certaines régions, le développement de la végétation. En vain voudrait-on chercher ailleurs la cause pour laquelle la planète Mars n’est pas, comme le croyait l’illustre physicien Fizeau, un désert de glace.

D’après ces données et ce que nous savons d’autre part sur les divers aspects de la surface de Mars, il devient possible de trouver une explication plausible des phénomènes observés. Les régions sombres, désignées sous le nom de canaux et de mers, sont les parties de la surface où vient affleurer l’humidité tiède montant de l’intérieur à travers les fissures de l’écorce. Le sol meuble, échauffé en même temps par les rayons d’un Soleil que ne voile aucun nuage, se prête merveilleusement au développement d’une riche végétation. Ces végétaux, quels qu’ils soient, dont les racines plongent dans le sous-sol humide, et dont les parties aériennes absorbent les rayons solaires, entretiennent constamment au-dessous d’eux une température douce qui permet à l’eau de rester à l’état de vapeur. Pendant le jour, la vapeur qui enveloppe ces « forêts », échauffée par le Soleil, peut demeurer invisible ; mais aussitôt que le Soleil s’abaisse sur l’horizon, l’humidité qui s’élève au-dessus des hautes cimes se condense en givre ou en brouillard. Les régions qui nous apparaissent sombres à leur passage au milieu du disque doivent donc devenir blanchâtres quand elles se trouvent près des bords.

Ce qui caractérise surtout les taches sombres de Mars, c’est leur variabilité d’aspect. D’une opposition à l’autre, elles peuvent passer du gris clair à la teinte vert foncé. Beaucoup de canaux disparaissent à certaines époques et ils ne sont jamais visibles tous à la fois. Cette atténuation, ou même cette disparition complète des taches et des lignes qui sillonnent la planète Mars, semble coïncider avec la saison d’hiver. En général, les oppositions de teintes sont plus tranchées et les contours sont mieux définis dans celui des deux hémisphères qui est en été. D’après M. Flammarion, « le froid voile la surface de Mars, la chaleur la