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DU LIGONDÈS. — LA CONSTITUTION PHYSIQUE DE MARS.

globe terrestre. Sur notre planète, les grandes inégalités du sol sont généralement dues à des plissements de l’écorce occasionnés par le retrait du noyau sur lequel cette écorce s’appuie. Comment supposer que, sur Mars, l’enveloppe solide puisse devenir trop étroite pour recouvrir entièrement son noyau ? La raison de cette apparente contradiction se trouve dans la diversité des circonstances qui ont présidé à la naissance des deux planètes.

D’après notre théorie, la Terre, planète à formation rapide, a dû passer par l’état gazeux avant d’être le bloc liquide, incandescent, mais sur le point de se solidifier intérieurement, dont l’histoire appartient à la Géologie. En se solidifiant, l’écorce emprisonna à son intérieur un noyau liquide à très haute température, destiné à diminuer beaucoup de volume, soit par refroidissement, soit par les éruptions volcaniques. Le mode de formation de cette écorce devait la préserver de toute contraction ultérieure. De même que les glaçons charriés par un fleuve finissent par se prendre en une seule masse sous l’action persistante du froid, ainsi les premières scories flottant à la surface du globe terrestre ont dû former d’abord une mince enveloppe à peu près continue et encore chaude. Puis, le refroidissement, ou toute autre cause, venant à crevasser la surface, aussitôt les matières demeurées fluides au-dessous de cette pellicule, s’échappant à travers les fissures, en ont garni les vides. La continuité de l’écorce a pu ainsi rester assurée jusqu’au moment où son épaisseur est devenue suffisante pour lui procurer une stabilité relative ; sa température était alors assez basse pour que sa surface, protégée contre le rayonnement extérieur par une épaisse couche de gaz ou de vapeurs, fût à l’abri d’un refroidissement rapide. Par contre, le noyau, composé de liquides extrêmement chauds et de gaz comprimés retenus en dissolution, n’a pas tardé à se contracter dans son enveloppe, obligeant celle-ci à se doubler pour se maintenir au contact. Telle est la cause générale de la formation des chaînes de montagnes.

Mais pour Mars, notre théorie de la formation lente conduit à un mode de contraction tout opposé. C’est à M. l’abbé Moreux que revient l’honneur d’avoir, le premier, mis en lumière cette divergence.

Si Mars s’est formé lentement, on peut dire qu’à toutes les phases de sa vie astrale les matériaux qui venaient s’ajouter au noyau déjà formé ont opéré leur condensation d’une façon plus régulière ; la chaleur développée devait, en effet, être moins intense que dans le cas d’une agglomération rapide, et la contraction avait le temps de se faire au fur et à mesure de la formation.

Les derniers amas, ceux de la couche superficielle, se réunissaient donc à un noyau qui devait fort peu se contracter par la suite.

Considérons maintenant cette dernière couche au moment où, se refroidissant à son tour, elle est prête à se solidifier. Si rien ne la protège contre le rayonnement extérieur, elle perdra vite sa chaleur d’origine et celle qu’elle a pu acquérir au contact de la couche sous-jacente ; en se refroidissant, elle tendra à se resserrer, et bientôt elle deviendra trop petite pour envelopper le noyau qu’elle