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DU LIGONDÈS. — LA CONSTITUTION PHYSIQUE DE MARS.

atmosphère au niveau du sol atteint à peine la moitié de celle de l’air au sommet de l’Himalaya. S’il est vrai que Mars emprunte au Soleil toute sa chaleur de surface, l’eau ne semble pas pouvoir y subsister autrement qu’à l’état de glace.

On a tenté, il est vrai, d’expliquer la douce température qui règne sur Mars par la présence dans son atmosphère de substances douées de la propriété d’absorber les rayons calorifiques solaires. On a voulu d’abord faire intervenir la vapeur d’eau qui possède, à un haut degré, ce pouvoir absorbant. La conséquence immédiate d’une grande quantité de vapeur d’eau dans son atmosphère serait la formation constante de nuages. Or, nous n’en voyons presque jamais.

En vain voudrait-on remplacer la vapeur d’eau absente par d’autres gaz jouissant des mêmes propriétés absorbantes. Outre que l’existence de ces gaz dans l’atmosphère de Mars est très problématique, leur principal effet serait de faire bénéficier la planète d’un climat analogue à celui de nos contrées maritimes. Or, dans les régions du globe terrestre où l’atmosphère est chargée d’humidité, la différence de température entre le jour et la nuit est presque insensible. Sur Mars, au contraire, les variations diurnes de la température d’un lieu déterminé semblent nettement accusées, et elles dépendent de la hauteur du Soleil au-dessus de l’horizon. La preuve de cette assertion résulte des apparences mêmes de la planète, dont le disque présente une gradation lumineuse allant du centre vers le contour.

La blancheur circulaire qui limite l’hémisphère éclairé, tourné vers nous pendant les périodes d’opposition, est due vraisemblablement au dépôt, pendant la nuit, d’une abondante rosée ou gelée blanche qui fond presque entièrement vers le milieu de la journée.

L’atmosphère transparente de Mars ne remplit donc pas, autour de la planète, l’office d’enveloppe protectrice contre le rayonnement nocturne, comme le fait pour nous, par exemple, une mince couche de nuages.

En résumé, les régions martiennes qui correspondent à nos zones torride et tempérées, paraissent jouir du même climat que le nord de la France pendant les beaux jours de novembre ou de février. Le peu d’étendue des neiges polaires à la fin de l’hiver qui, pour l’hémisphère austral, dure 381 jours, leur fonte facile aux rayons du Soleil d’été, prouvent que le climat de la zone glaciale est relativement doux. Par comparaison avec la Terre, la différence de température est généralement plus sensible entre le jour et la nuit, et moins tranchée en latitude.

La preuve que le rayonnement nocturne agit sur Mars autant que sur la Terre étant faite, il reste à trouver la source de chaleur capable d’empêcher les eaux de passer à l’état de neiges éternelles. Le Soleil est manifestement insuffisant. Si l’on désigne par le nombre 100 la quantité totale de chaleur reçue par Mars dans le cours d’une année de 687 jours de 24 heures, cette somme se partage ainsi pour chaque hémisphère :

63 pendant la période d’été (d’un équinoxe à l’autre),
37 pendant» la période» d’hiver un équinoxe» à l’autre»