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DU LIGONDÈS. — L’ÂGE DE MARS.

Telle est la remarquable hypothèse nouvelle de M. Du Ligondès. Elle nous intéresse ici en ce qui concerne l’âge de Mars, et voici sur ce point spécial la conclusion qui en a été déduite par M. l’abbé Moreux :

Pour évaluer l’âge de Mars, on s’est toujours appuyé sur l’hypothèse de Laplace. Or, celle-ci n’a pas été corroborée et a été même contredite par les découvertes modernes. Il a donc fallu abandonner et l’hypothèse et ses conséquences.

La nouvelle théorie cosmogonique de M. le colonel Du Ligondès rend assez bien compte de la plupart des particularités connues du système solaire. Rejetant a priori tout mouvement systématique initial — rotation ou tourbillons — comme contraire au principe même de l’hypothèse, M. Du Ligondès admet simplement que les planètes proviennent de la condensation d’une nébuleuse à peu près ronde, quoique légèrement aplatie, à l’intérieur de laquelle les mouvements auraient eu lieu presque également et en tous sens. C’est même à cette égalité approchée que la nébuleuse doit sa figure initiale.

M. Du Ligondès démontre ensuite que la nébuleuse s’aplatit de plus en plus, en même temps que se forment dans son intérieur des condensations locales. Par suite de l’aplatissement progressif, la plupart de ces condensations vont se réunir dans le plan de l’équateur pour donner naissance d’abord à des anneaux, puis aux globes planétaires. Or, il est clair, d’après le principe même de l’attraction universelle, que, toutes choses égales d’ailleurs, l’importance de ces globes augmentera avec l’ancienneté des agglomérations qui leur auront donné naissance. Les premiers globes en formation deviendront aussi les plus volumineux. Jupiter, la plus grosse de toutes les planètes, serait en même temps la plus ancienne. Entre ce géant du monde planétaire et le Soleil, c’est le système Terre-Lune qui est prépondérant ; ce doit être également le plus ancien de tous les systèmes inférieurs. Dans la zone intermédiaire occupée par Mars et la multitude des petites planètes, les matériaux tiraillés en sens divers ont eu quelque peine à se réunir : la dispersion des petites planètes sur des orbites excentriques et fortement inclinées en est la preuve.

Mars a donc eu à la fois sa formation ralentie et sa masse amoindrie par les actions opposées de Jupiter et de la Terre : c’est une planète de formation relativement récente. Elle est venue bien après la Terre, à l’époque de la naissance des planètes inférieures, Vénus et Mercure, sans toutefois qu’il soit possible de dire si elle est plus jeune ou plus âgée qu’elles. Comparée à Vénus qui semble entourée d’une épaisse couche de nuages et de vapeurs, la planète Mars avec son atmosphère raréfiée presque toujours limpide nous paraît plus avancée dans son évolution, plus vieille en un mot. Mais la durée d’évolution d’une planète dépend à la fois de la masse de cette planète et de la quantité de chaleur qu’elle a emmagasinée au cours de sa formation. Or, d’après la théorie de M. Du Ligondès, à égalité de masse, cette quantité varie à peu près en raison inverse de la distance de la planète au Soleil. Par unité de masse, elle serait donc environ moitié moindre pour Mars que pour Vénus ; de plus, à cause de la petitesse