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LA PLANÈTE MARS.

Le pont de la Lune (Lunæ Pons) a été représenté (imparfaitement) pour la première fois en 1862, dans ces mêmes dessins où Lord Rosse révéla le Solis Pons. Toutefois, il ne fut vu d’une manière bien déterminée qu’en 1873, par le Dr Terby, et dans un de ses dessins de cette année, celui du 24 mai, il apparaît très distinctement. Il est possible de le reconnaître ensuite en partie dans un dessin de Trouvelot de 1884. On ne le vit plus distinctement jusqu’au jour où on le découvrit de nouveau à cet Observatoire en 1894, vers le 10 août martien.

M. Leo Brenner le vit en Istrie le premier en 1896, le 1er juillet martien. Ici il fut bien visible dès le commencement des observations[1].

Le pont des Comètes ou Pons Cometarum a été vu ici en même temps que les autres ponts en 1894, quoique d’une façon moins évidente. On le revit encore avec eux cette année.

Le pont des Étoiles ou Pons Stellarum n’a pas été visible avant la date des dessins qui accompagnent cet article. C’est le plus difficile à observer de tous.

Maintenant, que sont ces chaussées ?

C’est la question qui se pose tout naturellement. Il n’est pas facile de donner une réponse rationnelle : ces phénomènes ne ressemblant à rien de ce qui se passe sur notre Terre. Certaines choses cependant peuvent nous aider à trouver une explication.

L’éclaircissement de la surface qui les rend visibles peut être dû au desséchement de la partie de cette contrée ; ce qui était d’une végétation verte est devenu sec et jaune et donne au sol un ton ocre. Le difficile à expliquer est la forme si bien définie de ces desséchements. Mais ici les canaux viennent à notre aide. Car il semble, d’après la position relative des chaussées et des canaux, que les uns sont à côté des autres et que, par conséquent, ce n’est pas la chaussée qui est réellement la cause de son aspect rectiligne, mais le canal qui le borde sans doute. Autrement dit, l’aire desséchée prend une forme régulière comme les canaux, parce que le desséchement ne peut pas s’étendre plus loin.

Ceci nous ramène à l’examen des tracés sombres observés dans la Grande Syrte. Ils sont de deux espèces, les lignes et les taches. Les lignes sont des canaux dans les régions sombres. M. Douglass les a découverts le premier en 1894.

Le plus long et le plus apparent de ceux-ci est le Dosaron. C’est la longue ligne qui, partant du fond de la Grande Syrte, remonte tout droit entre Hellas et Noachis et file presque jusqu’au bord du disque.

Le lecteur ne peut manquer d’être frappé instantanément par sa direction droite et sa largeur absolument uniforme ou, en d’autres termes, par son apparence artificielle.

Mais ce n’est pas tout. Après réflexion, il se souviendra que, lorsque la saison martienne était moins avancée, il existait à cette même place une région plus

  1. Nous l’avons observé et dessiné à Juvisy en décembre 1896. V. p. 284 et fig. 204 E.