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LA PLANÈTE MARS.

plus grand froid, sur les contrées les plus humides, sur les courants atmosphériques de l’équateur de chaleur aux régions polaires, sur les projections lumineuses dues à des nuages élevés éclairés par le soleil couchant. Nous avançons peu à peu et sûrement. Ce monde voisin a cessé de nous être étranger. Observons, comparons, jugeons, et ne désespérons pas du progrès.

ccxvi.Lowell. — Observations faites dans la mer du Sablier ou Grande Syrte.

Le même astronome a publié l’importante Notice suivante au Bulletin de La Société astronomique de France du mois de juin 1897 :

Depuis l’époque déjà lointaine où Huygens découvrit la période de rotation de la planète, par le déplacement et le retour de la « mer du Sablier », cette configuration martienne a été l’une des mieux observées et des mieux déterminées. C’est grâce à cette tache permanente que cet astronome put fixer la longueur du jour sur la planète, — ce que fit un peu plus tard Cassini d’une manière plus concluante encore. On supposa, tout d’abord, que c’était une mer, et d’après sa forme on lui donna le nom de mer du Sablier, nom d’une signification doublement heureuse, puisque, comme l’a montré Flammarion dans la Planète Mars, elle a servi de sablier, ou de compteur du temps martien, aux astronomes de la Terre. Schiaparelli lui a donné le nom de Grande Syrte, dans sa nouvelle nomenclature. Cette tache a été considérée comme une mer par plusieurs générations d’astronomes. Pendant plus de deux siècles, on ne douta pas de son caractère aquatique, et cette appréciation paraissait des mieux fondées. En fait, sa couleur correspond à cette interprétation naturelle. Dans les meilleures conditions d’observation, elle paraît d’un bleu vert foncé ; juste de la nuance correspondant à l’aspect lointain d’une mer. Ce caractère aquatique était si bien établi, que lorsque W.-H. Pickering conçut une autre explication de ces taches sombres, qui jusqu’alors avaient passé pour des mers, il s’abstint de la comprendre dans la liste et la laissa jouir de cette prérogative marine consacrée par le temps.

Mais tempora mutantur, et nous mutamur in illis. Notre conception du caractère de la mer du Sablier a suivi le sort commun. Malheureusement pour ceux qui aiment l’eau, le caractère de cette mer, ainsi que d’autres mythes charmants, doit s’évanouir dans les brumes du passé, car cette grande aire bleu vert n’est ni un océan, ni une mer, ni rien d’analogue, mais quelque chose qui en est fort éloigné : une grande étendue de végétation.

Le véritable caractère de la Grande Syrte se révéla à nos observations dès