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OBSERVATOIRE DE JUVISY.

Outre cette variation observée au nord-est de la mer du Sablier, les observations de Juvisy en mettent en évidence une autre plus importante encore peut-être. Le 5 novembre, j’observais un élargissement et un assombrissement du Trivium Charontis (fig. 201), lac ou oasis auquel aboutissent neuf canaux, et représentant l’une des régions les plus importantes de la géographie martienne. Cinq jours après, mon astronome-adjoint observait la duplication de cette tache sombre (fig. 202). Eh bien, ce n’est pas non plus la première fois que ce phénomène est observé. M. Schiaparelli a constaté le même dédoublement le 9 mars 1884, mais avec un aspect différent. On a vu également le lac du Soleil, le lac Isménius, offrir des dislocations analogues. Tout cela est bien étrange, bien fantastique, bien extraordinaire ; mais ne soyons pas trop sceptiques.

Brouillards sur Mars. — Les régions circompolaires boréales de la planète nous ont présenté en ces dernières semaines le phénomène, très rare sur cette planète, de brouillards s’étendant à des distances variables autour de la calotte neigeuse. Cette zone blanchâtre, moins éclatante que la neige polaire, s’est étendue jusqu’à une grande distance du pôle et a ensuite diminué. On aurait pu facilement la prendre pour une extension de la calotte polaire elle-même, et c’est ce qui a dû avoir lieu dans les anciennes observations[1].

25 novembre 1896, 14h 15m. Diamètre = 16″,90. Longitude du centre = 48°. Latitude du centre −0°,1. — Une grande calotte brumeuse couvre la région polaire boréale de Mars sur un arc aréocentrique d’environ 45°, soit sur une surface au moins quatre fois aussi considérable que celle des neiges polaires. La couleur du météore est d’un blanc mat caractéristique, sans limites bien définies. Le golfe de l’Aurore paraît par moments présenter deux taches sombres rondes et voisines, situées sur le prolongement du Gange. Le Sinus Acidalius est d’un noir d’encre extraordinaire, malgré sa proximité du terminateur, ce qui donne à la planète un aspect peu naturel. Le lac Niliaque est indiqué par un vague estompage. Les canaux du Gange et de la Jamuna sont doubles ; Chrysorrhoas et Agathodæmon paraissent élargis ; Nilokeras ne présente rien d’anormal ; enfin Hydraotes se voit comme une ligne très déliée (fig. A).

28 novembre, 12h 0m. Diamètre = 17″,03. Longitude = 349°. Latitude −0°,7. — Le brouillard du pôle inférieur est légèrement réduit depuis le 25. Sinus Sabæus est assez foncé, la baie du Méridien l’est davantage. On remarque l’étroit canal séparant la région de Deucalion de la Noachide, signalé pour la première fois pendant cette opposition, au mois d’août, par M. Stanley Williams. Le lac Ismenius est pâle, celui du Nil un peu plus sombre. L’Euphrate et l’Hiddekel paraissent doubles, Oronte et Gehon simples. Le Nil est large (fig. B).

30 novembre, 12h 15m. Diamètre = 17″,08. Longitude = 335°. Latitude −1°,1.

  1. J’ai adressé cette Note le 25 décembre 1896 aux Astronomische Nachrichlen, qui l’ont publiée dans le numéro suivant (3394) du 4 janvier 1897.