Alors que chaque pôle de Mars sort de son hiver, on observe, en effet, des taches comparativement blanches qui l’entourent. Elles sont généralement situées aux latitudes de 84° à 82°, c’est-à-dire à 6 ou 8 degrés du pôle, bien qu’elles puissent s’étendre quelquefois jusqu’à 60° et même 55° de latitude, sur un arc de 60 à 70 degrés ; elles disparaissent en totalité ou en partie, l’été suivant, lorsque le pôle est resté tourné vers le Soleil. Les bords s’évanouissent rapidement, mais les taches voisines du pôle persistent pendant plusieurs mois. Ces phénomènes admettent la très simple interprétation suivante, qui est d’ailleurs généralement acceptée : ces taches sont des neiges polaires qui se forment ou qui fondent selon les saisons ; mais l’entreprise d’expliquer comment une planète, recevant moitié moins de lumière et de chaleur que la Terre, puisse jouir à ses hautes latitudes d’un hiver si doux et d’un été si chaud a toujours été jusqu’ici considérée comme difficile.
Le Dr Bates avance[1] que ces taches polaires pourraient bien être des plages d’acide carbonique (CO²) et sa théorie a pour elle d’avoir trouvé quelque crédit auprès du Prof. Campbell, de la Section astronomique de Lick, à l’Université de Californie.
Mais aucune autorité ne nous explique ni ce que serait devenue l’eau qui a pu exister sur la planète et qui aurait été condensée avant l’anhydride carbonique, ni pourquoi, après l’évaporation de ce dernier, nous n’apercevons pas la neige et la glace, blanches également, qui ont dû être formées et précipitées bien avant que la planète eût atteint la température extrêmement basse à laquelle se congèle l’anhydride carbonique. Avant que cette interprétation remarquable soit l’objet d’une discussion, il faudrait établir que l’eau n’a jamais existé sur Mars, car elle eût été congelée d’abord et eût recouvert la planète d’une couche blanche sur laquelle la condensation et la fusion de l’anhydride carbonique, également blanc, seraient invisibles. Et la même objection peut évidemment être opposée à toute autre substance ayant un point de fusion compris entre ceux de l’eau et de l’anhydride carbonique. Quel que soit le point de fusion de la substance qui cause les calottes polaires de Mars, il est nécessairement le plus élevé qui puisse se rencontrer dans la série des constituants de l’atmosphère de la planète, car aussitôt après sa fusion nous observons la surface générale de l’astre.