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LA PLANÈTE MARS.

Cependant le 24 septembre cette calotte polaire était encore juste telle qu’au milieu d’août. À la fin de septembre, la fonte des neiges reprit et la calotte polaire continua à se rétrécir, si bien que, vers le 25 octobre, M. Schiaparelli n’en distinguait plus du tout. (Cependant, à Juvisy, nous avons continué à apercevoir encore un petit point blanc minuscule, et il en a été de même pour M. Barnard, au mont Hamilton, et pour M. Brenner, en Istrie.)

Cette rapide fusion d’une aussi grande quantité de neiges ne peut être sans conséquence sur les conditions hydrographiques de la planète. Sur la Terre, la fusion des neiges arctiques et antarctiques n’a pas une grande importance, parce que les calottes polaires glacées sont toutes les deux environnées d’un océan, qui va d’un pôle à l’autre : si son niveau s’élève par la fusion d’une partie des neiges polaires, d’autre part il décroît par la congélation des neiges de l’autre pôle. Une semblable compensation ne peut avoir lieu sur Mars, la grande mer qui entoure le pôle sud étant entièrement séparée des autres mers beaucoup plus petites qui sont voisines du pôle nord. L’équilibre des masses liquides des deux hémisphères ne peut s’établir que par le moyen de l’écoulement à travers les continents qui occupent les régions intermédiaires, et telle est la cause pour laquelle les variations que l’on observe dans le système hydrographique de la planète doivent être attribuées en grande partie à cette alternative de congélation et de fusion des neiges autour des deux pôles.

Les canaux sont sans doute des dépressions du sol, d’une largeur de 100 à 200 kilomètres et plus, peu profondes, allant en lignes droites de long de milliers de kilomètres. L’absence de pluie fait qu’ils constituent le mécanisme principal par lequel l’eau et la vie se répandent à la surface aride de la planète.

Sur la Terre, les changements de saisons se correspondent dans les deux hémisphères avec des effets presque entièrement symétriques. Les périodes de froid et de chaleur, de sécheresse et de pluie, se succèdent alternativement à des intervalles de six mois et à peu près symétriquement sur chaque hémisphère. Sur Mars, les différences de saisons sont beaucoup plus marquées pour chaque hémisphère. Comme on peut le voir à l’inspection d’une carte, tout l’Océan est concentré autour du pôle austral, auquel, par conséquent, ainsi qu’aux régions circonvoisines, doit correspondre une vaste dépression du sol de la planète. L’hémisphère boréal, au contraire, étant presque entièrement occupé par un grand continent, nous sommes raisonnablement portés à penser qu’il y a là des terres élevées, surtout aux environs du pôle nord. Il doit en résulter pour les climats et la vie organique des conséquences bien diverses suivant qu’il s’agit de la fonte des neiges boréales ou australes. Et c’est là un point qui mérite de nous arrêter un instant.

Considérons d’abord la calotte des glaces polaires australes, qui se forme entièrement sur l’océan martien et en occupe parfois le tiers ou le quart. La fusion de ces glaces a pour résultat une élévation du niveau général de l’Océan et des petites mers intérieures qui l’environnent comme appendices. Cette élé-