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LA PLANÈTE MARS.

neiges s’amoncellent durant la longue nuit polaire de 10 ou 12 mois et descendent jusqu’au delà du 70e degré de latitude ; mais, pendant les 10 ou 12 mois suivants, le soleil d’été a le temps de fondre presque toute la neige.

Remarquons aussi, dans la zone torride de Mars, un point situé par 268° de longitude et 16o de latitude boréale, où la neige a été vue pendant trois oppositions successives (1877-1882). Il y a sans doute là une montagne couverte de glaciers[1].

Ces neiges polaires sont des précipitations de vapeur condensée par le froid. Est-ce de la vapeur d’eau ? Les recherches d’analyse spectrale, principalement celles de Vogel, semblent bien l’indiquer. Si ce fait était incontestable, il s’ensuivrait que la température de cette planète serait peu différente de la nôtre, et non pas de 50 ou 60 degrés au-dessous de zéro, comme on l’a supposé, car dans ce cas la vapeur d’eau ne serait pas un des éléments principaux de l’atmosphère de Mars et il faudrait plutôt songer à l’acide carbonique ou à d’autres liquides dont le point de congélation serait très bas.

Les nuages sont très rares sur Mars. Tandis que la géographie terrestre serait si rarement et si difficilement reconnaissable pour un observateur situé dans l’espace, par exemple sur la Lune, à cause des nuages qui s’étendent presque constamment dans notre atmosphère, il n’en est pas de même sur Mars, toujours nettement visible. Çà et là, on aperçoit parfois des voiles blanchâtres, notamment sur les îles de la mer australe, sur l’Elysium et le Tempé. Leur blancheur est généralement plus grande le matin et le soir qu’à midi. Ce pourraient être des brouillards, ou de la rosée, ou de la gelée blanche.

Tout conduit à penser que le climat de Mars est celui de nos hautes montagnes, très chaud en plein soleil de jour, très froid pendant la nuit. Pas de nuages en général, pas de pluies, des cirri et de la neige.

Certaines régions paraissent intermédiaires entre l’eau et la terre. Telles sont les îles éparses dans la mer australe et la mer Érythrée, les péninsules de Deucalion et de Pyrrha, ainsi que Baltia et Nerigos. L’idée la plus naturelle et la plus conforme à l’analogie est de supposer là de vastes lagunes, dont le ton varie selon la profondeur d’eau. Plus il y a d’eau, plus le ton est foncé.

L’aspect de la planète varie constamment : « Une carte générale ne peut jamais représenter ce qui est, mais un ensemble de ce qui a été vu. Le meilleur moyen de se rendre compte des vrais aspects de la planète est d’examiner les centaines de dessins réunis dans l’ouvrage de Flammarion. Voici un exemple : Le 15 septembre 1892, le disque de Mars se présentait tel que le montre la figure suivante (191) : la côte de la mer Érythrée, le Phison, l’Euphrate probablement double, la double corne du golfe Sabæus avec l’Oronte et le Gehon, le golfe des Perles, avec l’Indus, l’Hydaspe et la Jamuna. Ce qui est le plus remarquable sur ce dessin, c’est la grande île blanche qui s’élève en tournant presque jusqu’au

  1. Nix atlantica, à gauche de la mer du Sablier, au-dessous du Népenthès.