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OBSERVATOIRE LOWELL. LES MERS MARTIENNES.

Cette carte (fig. 123) ne renferme pas moins de 288 objets, mers, lacs et canaux. Toutes ces configurations représenteraient non pas de l’eau, mais de la végétation produite par une eau invisible. L’argument principal de cette nouvelle théorie est que les lignes sombres appelées canaux traversent aussi les régions foncées appelées mers.

Les mers martiennes ont été, dans le même Volume, l’objet d’une étude spéciale par M. W.-H. Pickering :

La conclusion la plus importante de notre Travail, écrit-il, est que la planète ne présente pas toujours le même aspect à la même époque de deux années martiennes consécutives. Cette remarque s’applique non seulement à de légers détails, mais encore à des configurations caractéristiques.

Ainsi, on remarque, au nord de Noachis, un tracé en forme de la lettre Y qui était très accentué en 1892 et que l’on n’a pu retrouver en 1894 aux mêmes dates de l’année martienne, 30 juin et 6 juillet 1894, correspondant aux 12 et 18 août 1892.

Un large golfe sombre bordant la neige fondante, au sud de Syrtis Minor, était à peine visible en 1892. Mais en 1894 il était très caractéristique et, examiné au polariscope d’Arago, a montré des traces certaines de polarisation. C’était donc de l’eau qui, située non loin du bord, réfléchissait fortement la lumière de l’atmosphère martienne. Sur le reste du disque, la polarisation n’était pas visible. Lorsque cette région revint en vue, le 9 juillet, l’observation a été renouvelée, mais aucune trace de polarisation ne put être perçue. La couleur, du reste, avait changé. Au lieu d’être bleue, elle était d’un ton chocolat, différent du gris bleu de la région plus au nord. Ces régions grises ne montrèrent non plus aucune trace de polarisation. Leur couleur ne doit pas être due à de l’eau. Je suis d’avis, ajoute M. Pickering, que s’il y a de l’eau sur Mars il y en a fort peu.

Ces larges régions grises étaient bien vertes en 1890, juste avant l’équinoxe de printemps. Au commencement de 1892, aussi, de larges surfaces vertes ont été observées sur la planète, mais à mesure que la saison avança ce vert tourna au gris. En 1894, peu de couleur. Il y a là tant de variations en étendue, avec la saison, qu’à moins d’imaginer de formidables inondations accompagnées de nuages dans le régime habituel de Mars, nous sommes forcés de chercher une autre explication. L’hypothèse que ces changements sont dus à de la végétation paraît la plus probable à l’observateur. On voit aussi parfois des dépressions sur le terminateur, paraissant