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LES CANAUX.
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rendu probable par l’aspect des neiges, blanches comme les nôtres, et qui fondent — en s’évaporant sous l’action de la chaleur solaire, — comme nous l’observons sur la Terre. Cette analogie est rendue plus probable encore par les raies d’absorption du spectre de l’atmosphère martienne, raies qui correspondent à celles de la vapeur d’eau. Mais il n’en est pas moins probable que ces eaux doivent différer des nôtres.

Qui sait si au lieu du chlorure de sodium, par exemple, associé à l’hydrogène et à l’oxygène, comme dans nos mers, il n’y a pas là toute une autre combinaison d’éléments ?

La densité, d’une part, n’est pas la même qu’ici. Un mètre cube d’eau terrestre pèse 1 000 kilogrammes ; un mètre cube d’eau martienne a pour densité 0,711 et ne pèse que 711 kilogrammes, en admettant que la densité de cette eau soit la même que celle de l’eau terrestre proportionnellement à la densité moyenne de la planète. Si l’eau martienne avait la même densité absolue que la nôtre, les matériaux auraient pour densité spécifique 3,91 au lieu de 5,50. Mais, d’autre part, la différence de pesanteur est beaucoup plus grande encore, puisque 1 000 grammes terrestres transportés à la surface de Mars ne pèseraient plus que 376 grammes.

Les conditions sont donc entièrement différentes de ce qu’elles sont ici. Il en est de même de l’atmosphère dont la pression joue un rôle si important dans les transformations de l’eau. Si l’atmosphère terrestre disparaissait, l’eau des mers s’évaporerait immédiatement pour donner naissance à une nouvelle atmosphère aqueuse, jusqu’à ce que la pression devint assez forte pour maintenir l’eau à l’état liquide, En continuant de faire disparaître l’atmosphère, on finirait par dessécher totalement toutes les mers.

Si Mars avait la même atmosphère que la Terre, cette atmosphère serait toutefois beaucoup moins dense que la nôtre, dans la proportion de 376 à 1000. Le baromètre, au lieu de marquer 760mm, au niveau de la mer, n’en marquerait que 286. C’est la pression barométrique au sommet de nos plus hautes montagnes, à près de 8 000 mètres d’altitude. Ce serait là une couche aérienne très raréfiée, même au niveau de la mer, et il semble bien que l’atmosphère de Mars ne soit pas très éloignée de cette condition.

Mais elle peut posséder des substances, des gaz, des vapeurs, qui n’existent pas dans la nôtre.

Ne nous dissimulons pas toutefois que la plus grosse difficulté reste : le tracé rectiligne et géométrique de ce réseau ne paraît pas naturel. Plus nous regardons ces dessins (ouvrons encore ce livre aux pages 361 et 440), et moins il semble que nous puissions les attribuer à des causes aveugles. Pourtant, n’oublions pas que nous sommes loin de connaître toutes les forces de la nature.