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LES CANAUX.
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se jette dans le lac variable de Tithonius ; l’Araxes, le Sirenius et en général toutes celles qui aboutissent à des golfes et des embouchures.

Tous ces fleuves vont du Nord au Sud, comme s’ils arrivaient, par des transformations successives, des neiges polaires boréales et de continents plus élevés que les mers équatoriales dans lesquelles ils se jettent, ces mers équatoriales s’étendant d’ailleurs et se disséminant vers le pôle sud sans qu’on ne rencontre plus aucune grande terre.

Ces étendues d’eau sont sujettes à des variations considérables. Parfois l’Indus est beaucoup plus large que l’Hydaspe, parfois c’est le contraire. Ainsi, par exemple, dans ses observations de 1858, le P. Secchi a constamment observé et dessiné : 1o la baie du Méridien, golfe simple, allongé en pointe, 2o l’embouchure de l’Indus, 3o l’Hydaspe, sans jamais avoir figuré l’Indus lui-même ; nous venons même de le rappeler à la fin du chapitre précédent. Les comparaisons faites sur les autres points conduisent à la même conclusion.

Ici, il y a un caractère important à signaler.

L’existence de nombreux cours d’eau rectilignes traversant en tous sens les continents de Mars indique que ces continents sont de vastes plaines.

Le fait d’inondations fréquentes sur d’immenses étendues, le long des rivages, conduit d’autre part à la même déduction.

Nous pouvons donc admettre que les continents sont presque absolument plats.

Mais le nom de fleuves n’en est pas moins applicable à ces cours d’eau, fleuves très larges, nappes d’eau sans profondeur.

Ainsi il peut et il doit exister des fleuves dans ces tracés, tout au moins des fleuves primitifs, qui d’abord, sans doute, prenaient naissance en terre ferme par des ramifications de rivières et de ruisseaux, et qui ensuite ont été allongés d’une mer jusqu’à l’autre, peut-être par suite d’une cause aréologique, donnant le même résultat que celle dont M. Daubrée parlait plus haut. Des brumes d’une nature spéciale peuvent s’étendre sur ces cours d’eau. Des phénomènes de réfraction peuvent les doubler en certaines circonstances. Ces brumes jouent peut-être un grand rôle dans les faits observés.

Sur la Terre, l’eau existe en cinq états différents : l’eau solidifiée en minéral, appelée glace, les flocons de neige, l’état liquide, l’état nuageux et l’état invisible de vapeur transparente répandue dans l’atmosphère. Peut-être pourrions-nous conclure des observations que sur Mars il existe en six états, et que l’état nuageux se partage là en deux autres.

Déjà ici, les nuages et les brouillards diffèrent sensiblement les uns des autres. Le brouillard est stationnaire ; le nuage voyage. Le vent passe à