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L’ATMOSPHÈRE DE MARS.

qu’ici. Ce fait n’empêche pas la possibilité d’autres substances aériennes.

L’existence de l’atmosphère martienne est donc absolument démontrée. Cette atmosphère diffère de la nôtre à plusieurs égards.

D’abord, elle ne se charge pas de nuages comme celle que nous respirons. On n’y voit point d’immenses régions couvertes, comme il arrive chez nous, pendant des jours, des semaines et des mois. En général, cette atmosphère est transparente, et elle ne s’oppose presque jamais à ce que nous distinguions les configurations de la surface. Lorsque nous ne pouvons rien observer sur Mars, la faute en est presque toujours à notre atmosphère.

Vue de loin, la Terre est beaucoup plus difficile à observer que Mars : son épaisse atmosphère l’enveloppe d’un voile rarement transparent.

Ce que nous disons là s’applique surtout à l’hémisphère martien qui est en été. Là, le ciel est presque constamment pur pour toutes les latitudes. Il en est de même, en général, à l’équateur. Mais assez souvent l’atmosphère est voilée au-dessus de l’hémisphère qui est en hiver. Ainsi, par exemple, en ce moment (juillet-août 1892), l’hémisphère austral de Mars est en été : date de son solstice d’été : 13 octobre, et l’hémisphère boréal, au contraire, est dans son automne et approche de son hiver ; eh bien ! on aperçoit sensiblement moins de détails sur cet hémisphère que sur l’autre.

Il semble que le froid voile l’atmosphère de Mars et que la chaleur la clarifie.

Le limbe oriental du disque se montre généralement plus blanc que l’occidental. Peut-être y a-t-il là (c’est le méridien du lever du soleil ou du matin) de légères brumes que l’astre du jour ne tarde pas à dissiper.

Quels effets peuvent produire, vus d’ici, les nuages flottant au-dessus d’une planète ?

Lorsque les nuées se projettent sur les taches foncées de Mars, elles se montrent sous l’aspect de lignes diffuses et de formes variables. Elles peuvent être aussi brillantes que les régions les plus claires de la planète. En d’autres cas, elles peuvent paraître moins claires, mais pourtant toujours plus que le fond sur lequel elles se projettent. « Ces tons indiquent probablement non une couleur particulière des nuages, écrit M. Schiaparelli, autrement on pourrait en voir de sombres sur de fonds clairs, ce qui n’arrive pas, mais une plus grande transparence, qui n’empêche pas de voir entièrement, mais qui voile les détails. C’est ce que j’ai observé notamment sur la mer Érythrée et la terre de Noé. »

Les brumes atmosphériques paraissent s’éclaircir progressivement sur les terres équatoriales du solstice d’été austral à l’équinoxe d’automne suivant. L’atmosphère paraît claire au-dessus des mers intérieures pendant les mois qui suivent immédiatement le solstice austral.

Dans la zone comprise entre le 10e et le 30e degré de latitude australe,