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LA PLANÈTE MARS.

teinté en jaune rougeâtre ; les arcs et sinuosités, dont on a voulu faire des canaux, sont d’un bleu plus ou moins accentué, tournant souvent au gris bleuâtre ; les taches neigeuses des pôles et les autres taches moins brillantes des régions centrales ne paraissent pas varier beaucoup d’éclat par le fait de leur position plus ou moins orientale ou occidentale ; toutefois, c’est au centre de la planète que les taches blanches équatoriales brillent du plus vif éclat.

2. Avant ou après l’opposition, surtout quand les phases deviennent bien accentuées, les taches blanches équatoriales sont brillantes et nettement délimitées au soleil levant, pâlissent et s’évanouissent en approchant du midi, et redeviennent particulièrement brillantes, mais vagues, vers le couchant. Leurs formes varient aussi ; à l’Orient, elles sont arrondies, souvent bordées d’une arcature bleuâtre. À l’extrême Occident, ces taches assez larges, alors, sont limitées par des arcs moins clairs, dont le centre est fréquemment dirigé à l’Orient ; quant aux arcatures moins occidentales, elles présentent une bordure blanche et brillante du côté de l’Occident, bleuâtre ou du moins plus sombre du côté de l’Orient.

3. Après l’opposition, à mesure que la planète gagne la quadrature, les teintes bleuâtres s’accentuent à l’Orient, tandis que celles tournant au jaune rougeâtre se concentrent vers l’Occident. Ce phénomène paraît provenir de l’envahissement, vers l’Orient, des arcs et taches bleuâtres, dont le nombre se multiplie et dont la teinte se prononce d’autant plus qu’on approche de la quadrature.

En dehors de toute hypothèse et de toute interprétation des formes constatées pour les taches de Mars, les phénomènes de coloration que je viens de résumer indiquent avec assez d’évidence qu’ils sont dûs, moins à la qualité intrinsèque des matériaux répandus à la surface de la planète, qu’à la manière dont ils réfléchissent pour nous la lumière du Soleil.

Toutefois, je ne voudrais pas de là inférer que la vaporisation et la condensation des précipités atmosphériques ne jouent pas un certain rôle dans les inégalités de coloration de la planète ; mais je suis porté à ne leur attribuer qu’un effet assez secondaire.

À toutes ces observations nous pourrions encore en adjoindre un certain nombre d’autres, notamment celles de MM. Guiot, Schmoll, Bruguière, Bressy, Léotard, Lihou, Vimont, Courtois, Leclair, Fenet, Tramblay, E. Duval, F. Loiseau, Duménil, Quénisset, Norguet, Henrionnet, Cap. Noble, Denning, Antoniadi, Landerer, José Comas, Valderrama, Decroupet, Lorenzo Kropp, Stenberg, etc. ; mais elles n’ajouteraient aux précédentes aucun document nouveau[1].

  1. Il y a eu conjonction de Mars et Jupiter (59′), le 13 novembre 1890, observée, entre autres, par MM. Dutheil et Deval, à Billom. Jupiter, brillant du plus vif éclat, paraissait jaune d’or et Mars offrait une teinte rouge remarquable.