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LA PLANÈTE MARS.

cxli. 1890. — Terby. Études nouvelles. Observations de MM. Schiaparelli et Stanley Williams.

« L’apparence de canaux simples ou géminés à la surface de Mars, signalée pour la première fois par M. Schiaparelli, écrit M. Terby[1], a-t-elle été vérifiée réellement par d’autres observateurs ? Malgré les résultats positifs obtenus pendant l’opposition de 1888, certains doutes semblaient encore rester dans l’esprit de quelques astronomes. On invoquait surtout les résultats en partie négatifs de l’Observatoire Lick ; on oubliait que MM. Holden et Keeler avaient, en réalité, observé quelques canaux, en commençant leurs investigations seulement trois mois après l’opposition, à une époque où la planète, trop éloignée, est déjà abandonnée par les aréographes.

On attendait donc avec impatience les premières nouvelles de l’opposition de 1890. Un astronome anglais bien connu. M. Stanley Williams, est en voie de rendre pleine justice à M. Schiaparelli.

Mars s’est présenté, cette année, dans des conditions déplorables : sa déclinaison australe de 23° ne lui permet de s’élever que de 16° environ au-dessus de notre horizon, à son passage au méridien ; aussi les ondulations continuelles de l’image ne m’ont-elles permis, jusqu’au 23 juin, que de distinguer nettement les grandes lignes de la configuration, sans aucun détail délicat ; malgré des tentatives répétées, poursuivies chaque fois pendant une heure ou deux au moins, je dois dire, avec le plus vif regret, que mes résultats ont été d’une nullité absolue jusqu’à cette date.

Le 23 juin, pour la première fois, de 9h à 10h, j’ai pu utiliser avec quelque avantage l’oculaire 450 de mon 8 pouces ; j’ai vu alors, avec une grande netteté, et pour la première fois aussi, la baie que M. Schiaparelli figure sur la côte de la Grande Syrte, et d’où partent les deux canaux Astusapes et Astaboras ; par moments, et avec une grande certitude, je voyais la Syrte se bifurquer en ce point : d’un côté, elle se continuait par la Nilosyrte, très visible, et de l’autre par le canal Astusapes, qui partait de la baie en question et circonscrivait l’île Meroe. Le Protonilus avec le lac Ismenius et le Callirrhoe étaient encore plus visibles.

Le 24 juin, de 10h à 10h 30m, l’image fut assez bonne pour supporter les oculaires 250, 280 et 450 ; je revis les mêmes détails que la veille ; de plus, par moments seulement, mais avec une certitude complète, je vis le canal Astaboras se rendant en ligne droite de la baie dont j’ai parlé au lac Ismenius ; j’observais ce canal pour la première fois. Le Népenthès était extrêmement visible en cette occasion, et je crois même avoir vu à son origine le lac Mœris.

Le 25 juin, de 9h à 10h, l’image était de médiocre qualité ; une agitation continuelle rendit presque invisibles les canaux Astusapes et Astaboras, ce dernier surtout, mais sans effacer la baie où ces deux lignes prennent naissance ; par

  1. Académie de Belgique. — L’Astronomie, novembre 1890.