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LA PLANÈTE MARS.

bandes sont représentés dans notre Pl. II, superposés l’un à l’autre. Mais une telle superposition n’a pas été observée.

Un phénomène identique a été observé sur le lac de la Lune, qui, en 1879 et en 1882, était divisé en deux fortes bandes orientées suivant le double Nil, tandis qu’en 1884, l’orientation était dans la direction de l’Uranius : l’une et l’autre formes se trouvent superposées dans la Pl. II. Le Nœud Gordien a présenté aussi des phénomènes analogues, quoique bien plus difficiles à observer.

Il paraît résulter de tout ceci que la cause productrice des géminations n’opère pas seulement le long des canaux de Mars, mais aussi sur des surfaces sombres de forme quelconque, pourvu qu’elles ne soient pas trop étendues ; dans ce dernier cas, la direction de la même gémination peut être très différente d’une époque à l’autre, tandis que, dans le cas des canaux, elle ne peut osciller qu’entre d’étroites limites. Cette cause paraît étendre sa puissance même sur les mers permanentes ; car l’apparition de l’île Cimmeria au milieu de la mer Cimmérienne n’est au fond qu’une transformation de cette mer en une grande gémination composée des deux bandes obscures qui restent des deux côtés de l’île susdite. Un semblable phénomène semble se produire sur la mer Acidalienne, quoique avec moins d’évidence et de régularité.

Cette tendance à diviser un espace sombre par une bande jaune semble se manifester aussi par la production de certains diaphragmes ou isthmes lumineux d’étonnante régularité qui se forment en certains endroits de l’hémisphère boréal de la planète. Tel est le pont d’Achille, qui, en 1882-84-86, séparait le lac Niliacus de la mer Acidalium, et qui disparut partiellement en 1888 ; telle est aussi l’interruption qui sépare parfois le Nilosyrte de la Boreosyrtis, interruption qui se montre lorsque le Protonilus est doublé, et qui est en quelque sorte une continuation de la bande claire qui sépare les deux lignes composantes du Protonilus. Une autre interruption semblable dans le cours de la Boreosyrtis, qui existait en 1882, n’a plus été vue depuis. Enfin la duplicité du Sinus Sabæus et de la presqu’île Atlantis, qui sépare la mer Cimmerium de la mer Sirenum, paraît dépendre de phénomènes de la même nature.

G. — Phénomènes observés sur les canaux..

Telles sont les diverses apparences sous lesquelles peuvent se présenter les canaux de Mars et les formations analogues. Chacun d’eux a ses métamorphoses et son histoire particulière ; et cette histoire est liée sans doute à celle des canaux voisins, quoique cette connexion ne soit pas toujours bien apparente.

Pour donner une idée de la manière dont se développent dans leur succession les phénomènes des canaux de Mars, je choisirai un seul exemple entre cinquante. Il s’agit ici du canal appelé Hydraotes (fig. 234) et du Nilus, son prolongement. Pour mettre en évidence la correspondance des faits avec les saisons de Mars, j’ai inséré, parmi les observations, les dates des solstices et des équinoxes, en