Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 1, 1892.djvu/464

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
450
LA PLANÈTE MARS.

simple dans une autre section. Cerberus, Hydraotes, Achéron ont fourni de pareils exemples en 1882.

Quelquefois les deux lignes sont régulières et leurs axes parfaitement parallèles ; mais le tout est entouré d’une espèce de pénombre, comme Cerberus en 1882, Hebrus en 1888. Mais, dans le plus grand nombre de cas, les deux lignes sont tracées avec une régularité absolue et tout à fait géométrique ; l’uniformité de la largeur, de la couleur et de l’intervalle est complète. Leur examen, fait dans d’excellentes circonstances avec des grossissements variés, depuis 322 jusqu’à 650, n’a pu faire découvrir la plus petite irrégularité, ni même un soupçon d’irrégularité : tout paraît tracé avec la règle et le compas. Telles ont été, entre autres, en 1882, Cyclops, Euphrates, Phison, Jamuna, Hephæstus ; en 1886, Hydraotes ; en 1888, Euphrates, Phison, Astaboras, Protonilus, Callirrhoe. S’il existait quelque trace d’anomalie dans le canal simple primitif, elle disparaît complètement après la gémination. Des canaux sensiblement courbes ont même donné naissance à des géminations parfaitement droites, comme la Jamuna en 1882 et la Boreosyrtis en 1888. Il y a, en un mot, une tendance prononcée à l’uniformité plus absolue et à la suppression de tout élément irrégulier.

L’aspect d’une gémination change souvent suivant les époques. En 1882, les deux bandes de l’Euphrates montraient une sensible convergence du côté du Nord : l’une d’elles était à très peu près dirigée suivant un méridien de la planète. En 1888, les deux bandes étaient absolument équidistantes dans toute leur extension entre le Sinus Sabæus et le lac Ismenius ; leur angle avec le méridien était, au point moyen, 8° ou 10° environ. Elles étaient minces et bien définies en 1882 ; en 1888, les deux bords de chacune étaient estompés, leur couleur était plus claire, leur intervalle était sensiblement moindre qu’en 1882. De même, pour l’Hephæstus, les deux larges bandes rougeâtres de 1882 étaient réduites en 1888 à des lignes plus fines et de couleur plus sombre, l’intervalle mitoyen était réduit à la moitié. Une semblable réduction de l’intervalle paraît avoir eu lieu pour le Protonilus.

La gémination des canaux s’accomplit dans un intervalle de temps relativement court, et par une métamorphose rapide. Assez souvent il a été possible de restreindre, par des observations sûres, à un petit nombre de jours la limite de cette durée. Quelquefois la métamorphose a été complète dans l’intervalle de vingt-quatre heures, entre deux observations consécutives. Autant que j’ai pu en juger, le phénomène a lieu simultanément sur toute la longueur du canal doublé.

Dans un petit nombre de cas, il a été possible de constater quelques phases du procédé de gémination. Pendant le mois de janvier 1882, l’Euphrates a été visible jusqu’au 18 du mois sans rien offrir de bien remarquable. Le 19, il parut considérablement plus large et un peu nébuleux du côté gauche. Le 20, un brouillard dense m’empêcha d’observer. Le 21, la gémination était complète et tout à fait évidente. Dans le même mois de janvier 1882, le Ganges s’est montré simple jusqu’au 12. Le 13, il parut accompagné, à droite, d’une légère bande lumineuse,