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SCHIAPARELLI. — CONSTITUTION PHYSIQUE DE MARS.

Indépendamment de ces changements de couleur subordonnés à la rotation diurne, on remarque des changements analogues dans les régions continentales ; mais ceux-ci sont plus lents et souvent ils embrassent des régions très étendues. Tel est celui qui eut lieu pendant les années 1877 à 1879, sur la grande région qui s’étend entre les méridiens de 120° et de 170° jusqu’à 40° de latitude nord, et qui est connue sous le nom de mer Sirenum. Cette mer présenta sur toute sa surface, notamment dans sa partie supérieure, voisine de la mer susdite, un éclat bien plus grand que celui des autres régions continentales.

À cette classe appartiennent aussi les observations faites par moi, de 1877 à 1882, sur une petite tache d’un blanc clair, qui se trouvait à l’extrémité gauche du Népenthès, par 269° de longitude et 17° de latitude nord. Je vis cette tache pour la première fois le 14 septembre 1877 ; elle avait un diamètre de 8° environ et elle était à peu près carrée ; elle brillait bien plus qu’aucune autre partie de la planète et en même temps elle présentait des contours bien distincts. Cette tache, dont j’ai pu, sans hésitation, comparer la blancheur à celle des taches polaires australes, était encore visible le 14 octobre. J’observai le même phénomène, au même endroit, pendant l’opposition suivante, de novembre 1879 à janvier 1880 ; la grandeur n’avait pas changé, seulement la figure était devenue à peu près ronde. Surpris de la constance de cette tache claire, je lui donnai le nom de Nix Atlantica. Je la vis de nouveau, pendant l’opposition de 1881 à 1882, de novembre à mars, mais pas toujours avec la même facilité ; elle présentait des différences d’aspect et des variations d’éclat qui pouvaient bien ne pas être toujours imputables à la différence de netteté de l’image télescopique. Mais je l’ai cherchée vainement dans les oppositions suivantes, et elle était encore invisible cette année. Si son apparition dépend de la période des saisons de Mars, nous devons nous attendre à la revoir pendant les oppositions de 1892 à 1897, et il est facile d’apprécier de quelle importance sera sa réapparition pour l’étude de la constitution physique de cette planète.

Une tache analogue, mais bien plus petite et difficile (Nix Olympica) s’est montrée avec une grande persistance en 1879, par 129° de longitude et 21° de latitude nord ; son diamètre pourrait être de 4° ou pas beaucoup plus. Je n’avais pas vu cette tache en d’autres oppositions ; je ne l’ai pas revue. D’autres taches apparaissent, tantôt par ci, tantôt par là, dans les diverses parties des régions continentales ; elles sont d’un blanc plus ou moins vif et plus ou moins pur, généralement pendant quelques jours et sans aucune loi apparente. C’est ce qui est arrivé assez souvent, pendant les dernières oppositions, le long de la rive droite de la Syrtis Magna, et sur le littoral qui va de là au Sinus Sabæus, ainsi qu’en plusieurs autres endroits. Souvent une partie notable du disque se montre parsemée de taches blanches, ce qui a eu lieu, par exemple, le 18 et le 19 janvier 1882, dans les pays entre le Gange et l’Iris et le 31 janvier entre le Nilosyrtis et l’Indus. Il est arrivé aussi que des bandes blanches, sous forme de ceintures régulières, d’une largeur uniforme, se répandaient un peu obliquement, du Nord-Est vers le Sud-Ouest, avec une faible inclinaison sur les méridiens.