Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 1, 1892.djvu/434

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
422
LA PLANÈTE MARS.

cxxxi. 1888. — Schiaparelli. Observations nouvelles[1].

Ces observations nouvelles de M. Schiaparelli ont été adressées sous forme de lettres à notre savant collègue M. Terby, de Louvain, dont nous venons de voir les propres recherches. Elles ont été obtenues à l’aide du nouvel équatorial de Milan, de 18 pouces, lequel dirigé sur les étoiles doubles a prouvé sa puissance de définition : l’étoile ε Hydre a été découverte triple ; distance des composantes = 0″,20 à 0″,25 (moins d’un quart de seconde !).

Notre fig. 224 représente l’aspect de Mars les 8, 9 et 10 mai 1888. « De grandes nouveautés, écrit l’auteur, se sont présentées dans la région de Propontis ; avec les faibles grossissements, on ne voit qu’une traînée d’ombres confuses ; en employant 500 et 650, cela se résout en une espèce de triangulation curieuse, dont un côté est double ; cette triangulation continue encore à gauche, où il y a au moins deux triangles. Les côtés sont estompés, les sommets forment des taches noires assez visibles, de forme quelquefois allongée, le fond est jaune comme partout. »

Après l’existence des canaux, après leur gémination, remarque à ce propos M. Terby, cette triangulation vient mettre le comble aux mystères de Mars. Quelle analogie entre cette figure et le canevas trigonométrique de nos opérations géodésiques. Et ce côté double ! Et ces sommets plus foncés !

M. Schiaparelli ajoute : « Le Triton s’est changé en un golfe très large de la mer Cimmérienne ; c’est là un fait des plus frappants et des plus instructifs. »

Dans une lettre du 21 mai, l’astronome italien ajoute encore :

Le 20, le lac du Soleil, à peu près au méridien, était très pâle et peu visible ; le lac Tithon se voyait mieux. Iris, Fortuna, Chrysorrhoas, Ganges, Jamuna, Hydaspes, tous visibles, Ganges et Chrysorrhoas surtout, simples et droits, mais avec de très petites ondulations dans leurs deux bords, qu’on pouvait distinguer l’un de l’autre. La couleur cependant est si peu foncée (je crois que c’est une nuance de rouge), qu’il y a quelque difficulté à constater toutes ces lignes, et je doute qu’elles soient visibles avec un 8 pouces : avec 200 et 350 je n’ai pu les voir, mais avec 500 et 650 elles étaient distinctes. La même couleur peu foncée rend difficile à voir les deux lignes du Nil, qui est bien double ; les deux bandes sont assez larges et leur position est exactement celle de ma carte ; elles sont bien dessinées. Double aussi, mais mal dessiné et estompé est le Nilokeras. Le trait de droite du Nilokeras coupe le pont d’Achille, qui se trouve par là interrompu à son extrémité droite ; le reste de ce pont existe encore, mais enfumé

  1. Ciel et Terre, août 1888.