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C. FLAMMARION. — REMARQUES. OBSERVATIONS.

semblable à celle de l’atmosphère de la Terre ; c’est ce que l’on peut conclure en considérant la couleur que possède la lumière cendrée que la Lune renvoie vers la Terre à certains jours des premier et dernier quartiers. Cette lumière est en effet empruntée à la Terre directement éclairée par le Soleil, et peut nous donner une idée assez exacte de la couleur que possède la Terre, environnée de son atmosphère et vue de l’espace. Or la lumière cendrée est, d’après Arago, d’une teinte bleu verdâtre et nullement rouge, comme elle le serait si notre atmosphère était semblable à celle de Mars. La teinte rouge dont il s’agit indique avec une grande probabilité la prédominance relative de la vapeur d’eau sur les gaz dans l’atmosphère de Mars. On voit que l’hypothèse de l’état glaciaire de Mars paraît s’accorder assez bien avec les principales données physiques que nous possédons, jusqu’à ce jour, sur cette planète. »

À cette conclusion nous avons cru devoir opposer, à la séance suivante du 2 juillet, les observations concordantes qui les contredisent.

cxxix. 1888. — C. Flammarion. Remarques sur la planète Mars. Observations.

Voici cette réponse[1] :

« Je demande à l’Académie la permission de lui soumettre les faits suivants, en réponse aux considérations qui ont été présentées à la dernière séance par l’un de ses membres les plus illustres.

Les glaces polaires fondent plus sur Mars que sur la Terre. C’est là un fait d’observation constante. Tandis que chez nous les expéditions les plus hardies et les plus aventureuses ne sont jamais parvenues à s’approcher à moins de 7° du pôle nord, et sont restées beaucoup plus éloignées du pôle sud, tandis que nos deux pôles paraissent constamment entourés de glaces, sur Mars la fusion de ces glaces avec l’élévation du Soleil au-dessus de l’horizon s’opère presque complètement pendant l’été aux deux pôles de la planète, surtout au pôle sud, dont l’été arrive au périhélie de l’orbite.

En cette année 1888, la planète nous a encore présenté son hémisphère nord, par suite de son inclinaison. La limite des glaces polaires boréales a été nettement déterminée : elle s’est graduellement rapprochée du pôle pendant les mois de février, mars, avril et mai derniers. J’estime qu’à la fin du mois de mai, à l’époque de leur minimum, le diamètre de la tache polaire mesurait environ 300 kilomètres. (Le solstice d’été est arrivé, pour l’hémisphère boréal, le 16 février dernier, et l’équinoxe d’automne arrivera le 15 août prochain.)

Les neiges des deux pôles ont été depuis longtemps l’objet d’une attention scrupuleuse et de mesures très précises. Il est constant qu’elles fondent considérablement, beaucoup plus que sur notre planète. L’ensemble des observations montre d’ailleurs que le minimum arrive environ deux mois et demi à trois mois

  1. Comptes rendus de l’Académie des Sciences, 2 juillet 1888.