Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 1, 1892.djvu/401

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
389
DENNING. — OBSERVATIONS ET DESSINS.

» Quant à la mer du Sablier, elle se montre très faible et très étroite, sinon brisée tout à fait, dans la région qui se trouve à 10° ou 15° au sud de son extrémité boréale (voy. fig. 205, II et III). Cette particularité est bien représentée dans les dessins de Bœddicker. Sur d’autres dessins, je n’ai pu retrouver cette circonstance suffisamment indiquée. Il est évident, du reste, qu’on ne peut la bien remarquer que lorsque la région en question se présente auprès du centre apparent du disque, comme lors de la dernière opposition.

» Les dessins de Knobel de 1873 concordent généralement beaucoup mieux avec les miens que ceux que le même auteur a dessinés en 1884[1]. Sur la carte de Green, la mer Knobel est, à son extrémité australe, séparée de la faible bande courbe qui s’allonge à l’Est, comme dans les dessins nos 6, 7, 8 et 9 de 1873. Cette rupture n’est plus figurée dans les dessins ultérieurs de 1884, de sorte que cette région paraît avoir subi quelque changement d’aspect, à moins que la différence d’inclinaison ne soit la cause du défaut de concordance entre les observations. Il est probable que telle en est effectivement la véritable raison, car l’inclinaison de la planète en avril et mai 1873 était presque exactement la même qu’en mars et avril 1886, et c’est justement dans ces deux périodes que les dessins présentent la plus grande ressemblance dans leurs formes les plus remarquables. Je vois le rivage boréal de la mer Knobel distinctement séparé de la bande obscure longitudinale immédiatement contiguë à la calotte polaire boréale (fig. 205, IV). Le dessin no 12 du 19 mai 1873, par Knobel, représente les principaux traits de cette région tels que je les ai récemment observés. En 1884, cet astronome a dessiné toute la masse d’ombre qui entoure le pôle nord comme obscurcie sans interruption ; mais ces différences d’aspect sont dues, sans aucun doute, aux variations d’inclinaison.

» Pour ce qui est des détails en forme de canaux observés par Schiaparelli, j’ai distingué un grand nombre d’apparences qui suggèrent fortement l’existence d’une semblable configuration ; mais les dessins effectués en Italie pendant les trois mois d’octobre 1881 à février 1882 leur donnent un caractère défini et, sans parler de leur dédoublement, une rectitude de forme et une uniformité générale de ton que les observations ne confirment pas. Les détails les plus délicats et les plus complexes de la planète se présentent, à mes yeux, dans les meilleures circonstances, comme des ombres linéaires extrêmement faibles, avec des gradations évidentes de ton, et des irrégularités qui produisent çà et là des ruptures ou des condensations. S’ils existaient sous le même aspect, et avec la même sûreté de direction que les a représentés Schiaparelli, ils eussent été facilement aperçus ici, toutes les fois que la définition eût été suffisamment bonne ; car ces objets sont indiqués comme aisément observables dans la lunette de 8 pouces de l’Observatoire de Milan, en février 1882, alors que le diamètre de la planète était seulement de 13″. Le dédoublement de ces lignes pouvait aussi se reconnaître dans les mêmes conditions peu favorables. Ce qu’il y a de plus étonnant, ce n’est

  1. Voir plus haut, p. 377.