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LA PLANÈTE MARS.
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LXV. 1867. — Huggins, Secchi : Analyse spectrale de l’atmosphère de Mars.

Nous avons vu plus haut (1862, p. 182), les premières recherches sur le spectre de Mars, faites par Rutherfurd, Huggins, Miller et Vogel. M. Huggins y constata la présence des principales lignes du spectre solaire, et Rutherfurd, notamment, les raies C, D, E, b et G de Fraunhofer. À la séance de la Société royale astronomique de Londres du 8 mars 1867, M. William Huggins présenta sur ce sujet un nouveau mémoire dont voici le résumé.

Mars ne brille que par la réflexion de la lumière solaire. Son atmosphère absorbe une partie de cette lumière et indique par son spectre quelles substances la composent. Dans la région bleue et indigo de ce spectre, les raies ont paru trop faibles pour pouvoir être sûrement identifiées. Dans la région rouge, la raie C du spectre de Fraunhofer est parfaitement visible et son identité a été certifiée par les mesures du micromètre. À partir de cette ligne jusqu’à l’extrémité la moins réfrangible du spectre, on aperçoit un grand nombre de raies sombres. Une ligne très forte a été mesurée micrométriquement au quart de la distance de C à B. Comme on ne voit rien d’analogue en ce point du spectre solaire, on peut la considérer comme résultant de l’absorption causée par l’atmosphère de la planète. Les autres raies dans le rouge peuvent être identifiées, au moins en partie, avec B et a, ainsi qu’avec les lignes voisines du spectre solaire.

Le 14 février 1867, l’observateur remarqua des raies faibles des deux côtés de la ligne D. Celles du côté le plus réfrangible étaient plus fortes que celles de l’autre côté. Elles occupent des positions qui paraissent coïncider avec les groupes que l’on voit lorsque la lumière solaire traverse les couches inférieures de l’atmosphère et qui sont produites par l’absorption de gaz ou de vapeurs, notamment de la vapeur d’eau. Ces lignes indiquent probablement l’existence de substances semblables dans l’atmosphère de la planète. Elles n’étaient pas causées par l’atmosphère terrestre, car elles étaient absentes au même moment du spectre de la Lune, quoique celle-ci fût alors à une moindre altitude que Mars.

M. Huggins a également observé le spectre des portions les plus sombres du disque de Mars, c’est-à-dire des mers. Leur spectre est beaucoup plus faible dans toute sa longueur. Les matières qui forment ces régions foncées absorbent également tous les rayons du spectre. Nous pouvons en conclure que, comme couleur, elles sont neutres ou à peu près.

La couleur rouge de Mars ne doit pas être attribuée à une absorption élective, c’est-à-dire à une absorption de certains rayons seulement qui produiraient des intervalles sombres dans son spectre. D’ailleurs, il n’est pas probable