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BEER ET MÄDLER.

des observateurs regardaient aussi les autres taches comme variables ; cependant M. Kunowsky, à Berlin, assura qu’elles sont permanentes. Plusieurs observateurs font mention d’un éclat particulier du bord oriental et du bord occidental de la planète, ce qui donne l’idée de ménisques étroits entourant le globe, particulièrement à ces endroits. Les contradictions qui se présentaient dans ces observations faites avec des instruments différents, ou, si l’on veut, les changements physiques qui s’opèrent avec le temps, étaient par conséquent très considérables.

Depuis le 10 septembre jusqu’au 20 octobre 1830, nous fîmes des observations pendant 17 nuits plus ou moins favorables, dans lesquelles tous les côtés de Mars visibles dans cette opposition se présentèrent plusieurs fois à notre vue. Nous obtînmes 35 dessins de son disque. Nous n’avons pas trouvé à propos d’employer le micromètre, car la faiblesse des taches aperçues ne nous aurait permis de prendre aucune mesure proprement dite, et une appréciation d’après les parties du diamètre du disque nous parut promettre une certitude d’autant plus grande que la tache blanche du pôle austral, qui se montra dès le commencement avec beaucoup de précision, était bien propre à déterminer un méridien divisant le disque. Il s’écoula ordinairement un certain temps jusqu’à ce que la masse de taches, que l’on apercevait d’abord vague et indéterminée, présentât des formes parfaitement distinctes. Le dessin a été exécuté immédiatement devant le télescope : les coordonnées des points les plus distincts ont été déterminées par l’appréciation et représentées graphiquement, le reste du détail a été dessiné plus tard.

La tache la plus caractéristique qui ait frappé les observateurs est la petite tache ronde paraissant suspendue à un ruban ondulé que l’on voit sur les dessins nos  1, 2, 3, 14, 15 et 16 de 1830 et 4 de 1832 (voyez la fig. 67). Cette tache est la baie du Méridien de notre carte, à proximité du détroit Herschel II. Mais écoutons les observateurs eux-mêmes.

Une petite tache a, d’un noir très prononcé, se distingua si fortement des autres dès la première observation, par ses limites bien marquées, et fut si rapprochée de l’équateur supposé, que nous crûmes devoir la choisir pour notre tache normale dans la détermination de la rotation[1]. Elle parut à 9h 30m (fig. 1) à la faible distance de 7° d’arc de Mars du méridien central. Le 14, nous la vîmes depuis 10h (fig. 2) jusqu’à 15h 15m (fig. 4) s’avancer depuis l’hémisphère oriental jusque dans la proximité du bord occidental ; nous en avons pris cinq dessins. Le 15, à 8h 50m (fig. 5), elle n’était pas encore visible ; elle ne le fut qu’à 13h 15m.

  1. Cette petite tache si caractéristique a été observée pour la première fois le 3 septembre 1798, par Schrœter. (Voy. plus haut, p. 74 la fig. 52 de cet astronome.) Elle a été observée aussi le lendemain 4 septembre (fig. 53) et le 2 octobre. Elle est aussi sur les deux dessins de Kunowsky, en 1821-22 (voy. fig. 65, p. 93). Mais quelles différences d’aspects !