Page:Flammarion - La Fin du monde, 1894.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
60
LA FIN DU MONDE

manquant de force, tombaient, et étaient foulés aux pieds par leurs compagnons… Ils mouraient, asphyxiés, dans une atroce agonie. Avant minuit, c’est-à-dire durant la quatrième heure de leur réclusion, tous ceux qui étaient encore vivants et qui n’avaient point respiré aux fenêtres un air moins infect étaient tombés dans une stupeur léthargique ou dans un effroyable délire. Quand, quelques heures plus tard, la prison fut ouverte, vingt-trois hommes seulement en sortirent vivants ; ils étaient dans un état véritablement effroyable, semblant sortir à peine de la mort à laquelle ils venaient d’échapper.

« Je pourrais ajouter mille autres exemples à celui-là. Ce serait fort inutile, puisque le doute ne peut pas exister. Je déclare donc, messieurs, que, d’une part, l’absorption par l’oxyde de carbone d’une quantité plus ou moins grande de l’oxygène atmosphérique, que, d’autre part, les propriétés si puissamment vénéneuses de ce même gaz sur les globules vitaux du sang, me paraissent devoir donner à la rencontre de l’immense masse cométaire avec notre globe — lequel doit rester pendant plusieurs heures plongé dans son sein — je déclare, dis-je, que cette rencontre fatale est d’une gravité dont les conséquences peuvent être absolument désastreuses. On verra dans les rues les malheureux mortels chercher inutilement de l’air respirable et tomber morts d’asphyxie. Je ne puis trouver, pour ma part, aucune chance de salut.