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LA FIN DU MONDE

coptères aériens volant aux environs des terrasses des hautes tours. D’immenses navires voguaient sur la mer. Ce Paris classique était celui du cent soixante-dixième siècle de l’ère chrétienne, correspondant au cent cinquante-septième de la première ère astronomique ; c’était le Paris qui avait immédiatement précédé l’envahissement définitif de l’océan : son nom même était transformé, car les mots changent, comme les êtres et les choses. À côté, d’autres tableaux représentaient les grandes cités moins antiques, qui avaient brillé sur l’Amérique, sur l’Australie, sur l’Asie, et, plus tard, sur les terres océaniques émergées. Et ainsi cette sorte de musée rétrospectif rappelait la succession des fastes historiques de l’humanité jusqu’à la fin.

La fin ! Son heure sonnait au cadran des destinées. Omégar savait que toute la vie de la Terre consistait désormais dans son passé, que nul avenir ne devait plus exister pour elle, et que le présent même allait s’évanouissant comme le songe d’un instant. L’héritier du genre humain sentit se condenser dans sa pensée le sentiment profond de l’immense vanité des choses. Attendrait-il qu’un miracle inimaginable le sauvât de l’évidente condamnation ? Allait-il ensevelir les vieillards et partager leur tombeau ? Chercherait-il à conserver quelques jours, quelques semaines, quelques années peut-être, une existence solitaire, inutile et désespérée ? Il erra tout le jour dans les vastes