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LA FIN DU MONDE

Méditerranée à l’Atlantique, de Narbonne à Bordeaux, avait supprimé le long détour du détroit de Gibraltar, et d’autre part un tube métallique constamment franchi par les trains à air comprimé reliait la République d’Ibérie (anciennement Espagne et Portugal) à l’Algérie occidentale (ancien Maroc). Paris et Chicago avaient alors neuf millions d’habitants, Londres dix, New-York douze. Ayant continué sa marche séculaire vers l’ouest, Paris s’étendait du confluent de la Marne au delà de Saint-Germain. Il ne rappelait que par d’antiques monuments laissés en ruines le Paris du dix-neuvième et du vingtième siècle. Pour n’en signaler que quelques aspects, il était illuminé pendant la nuit par cent lunes artificielles, phares électriques allumés sur des tours de mille mètres ; les cheminées et la fumée avaient disparu, la chaleur étant empruntée au globe terrestre ou à des sources électriques ; la navigation aérienne s’était substituée aux voitures primitives des époques barbares ; on ne voyait plus dans les rues de pluie ni de boue : des auvents en verre filé étaient immédiatement abaissés à la première goutte, et les millions de parapluies antiques se trouvaient avantageusement remplacés par un seul. Ce que nous appelons aujourd’hui civilisation n’était que barbarie à l’égard des progrès réalisés.

Toutes les grandes villes avaient progressé au détriment des campagnes ; l’agriculture était exploitée par des usines à l’électricité ; l’hydro-