Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/608

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

breuses ou sur les plateaux enflammés des Cordillères, ricochaient sur les institutions séculaires de l’Europe ; ils secondaient le courant des idées révolutionnaires qui, comme une avalanche, ébranlaient de plus en plus les rouages usés de l’ancien régime. Par toute l’Amérique, c’est le nom de la République qui prédominait. On dirait que le nouveau monde sentait la sève de l’avenir bouillonner dans les idées de liberté et d’égalité ! Ne sont-elles pas, en effet, indispensables au développement des jeunes générations ? En lisant les Mémoires du prince de Metternich, on voit que sa perspicacité d’homme d’État ne s’était pas complètement méprise sur l’importance de ces crises que subissait toute l’Amérique du Sud, adoptant l’idéal du pavillon étoilé ; mais par son bon sens et sa grande pénétration, il sentait qu’il n’y avait rien à faire de ce côté. Le câble était coupé !

Sans doute, il y a une époque précise où les grands événements politiques se réalisent fatalement, qu’on s’y oppose ou non. L’esprit humain, ayant progressé, accomplit souvent un travail interne qui remue les nations, les agite et les pousse à des commotions inéluctables, d’où sort une ère nouvelle avec des institutions plus conformes au mode d’évolution réclamé par les temps. Mais ces événements ont leurs facteurs, comme toutes les forces produites ou à produire. Pour en considérer la nature, il ne faut en rien négliger. Eh bien, qu’on prenne en considération l’influence que Bolivar a exercée directement sur l’histoire d’une partie considérable du nouveau monde et indirectement sur le mouvement de la politique européenne, est-il possible de ne pas admettre en même temps que l’action de la République haïtienne a moralement et matériellement déterminé toute une série de faits remarquables, en favorisant l’entreprise que devait réaliser le génie du grand Vénézuélien ?