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Shabaka, en obtenant une victoire décisive sur Bokhoris, établit sans conteste la domination de l’Éthiopie sur l’Égypte soumise. « Rien n’indique, dit de Rougé, que Sabacon ait eu quelque combat à soutenir contre les Thébains pour monter sur le trône ; mais l’histoire nous apprend qu’il emporta de haute lutte la souveraineté de Memphis et qu’il fit mourir Bokhoris, après l’avoir vaincu. Il ne faut pas conclure cependant de cette vengeance que les Éthiopiens eussent des mœurs féroces, ou fussent alors moins civilisés que leurs nouveaux sujets. Tous les détails de leurs monuments prouvent au contraire qu’ils voulaient justifier aux yeux des peuples leur prétention hautement proclamée de représenter le sacerdoce d’Amon[1]. »

Il est temps que prenne fin la doctrine par laquelle on a voulu faire des anciens Éthiopiens un amas de barbares, incapables de s’élever à la civilisation, rien que parce qu’ils étaient de la race noire. À la lumière de la science moderne, cette doctrine ne peut plus subsister. Noire comme les Éthiopiens était la population de l’Égypte, et civilisés comme les Égyptiens étaient les habitants de l’Éthiopie. La différence qui existe entre la renommée des deux peuples, l’éclat supérieur que semble avoir eu la splendide civilisation de l’Égypte, provient uniquement de la situation géographique des pays du Bas-Nil, naturellement en communication avec toutes les nations qui fréquentaient la mer intérieure, c’est-à-dire toutes les côtes de l’Europe méridionale, de l’Afrique septentrionale et toutes les parties de l’Asie antérieure.

Aussi peut-on affirmer que jusque dans les derniers temps du moyen âge, les hommes d’érudition croyaient

  1. De Rougé, De quelques monuments du règne de Tahraka, (cité ` dans la Notice somm. des monuments Égyptiens, etc., p. 23. Paris, 1879.