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cile, en affirmant que le métis est inférieur en force, en moralité ou en intelligence aux deux races mères. C’était admettre implicitement que le métis constitue en quelque sorte un cas de tératologie. Car au point de vue théorique, l’infériorité intellectuelle ou morale ne peut s’expliquer autrement que par un certain arrêt de développement du cerveau, le rendant inapte à exercer les actes de cérébration qui accompagnent les hautes facultés de l’esprit ou coordonnent les impulsions du cœur.

Les savants ayant avancé une telle assertion, les gens d’une étude moins approfondie s’en emparèrent avec empressement. De là est sortie cette opinion que les races humaines s’abâtardissent par certains croisements, opinion que déroule avec tant de verbeuse complaisance M. de Gobineau, dans son fameux ouvrage sur « l’Inégalité des races humaines ». Mais admirez les méandres au milieu desquels la vérité fait son chemin ! Les monogénistes avaient adopté tout aussi bien que les polygénistes la théorie de l’inégalité des races ; mais ils ne tardèrent pas à comprendre qu’en admettant que le métis est toujours un être inférieur et dégénéré, ils fournissaient un argument sérieux contre l’unité de l’espèce humaine : le besoin de défendre leur doctrine les mit alors sur le chemin de Damas. Ils n’hésitèrent donc pas à affirmer à leur tour que le mulâtre, issu du blanc et du noir, est aussi intelligent que l’un et aussi vigoureux que l’autre. M. de Quatrefages, le plus remarquable des monogénistes, a surtout soutenu cette dernière thèse avec une constance qui n’est égalée que par son immense talent. Toutes sortes de preuves et de recherches ont été mises en œuvre pour enlever à ses adversaires le dernier argument qui semblait leur rester. « Enfin, dit-il, M. Torrès Caïcedo me citait parmi les mulâtres de sa patrie, des orateurs, des poètes, des publicistes et un vice-président de la Nouvelle-Grenade, qui est en même