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la plus belle pensée glanée dans les champs féeriques de la métaphysique.

Pour étudier le cerveau, au point de vue anthropologique, il faut donc se dépouiller de toute idée préconçue ; il faut considérer froidement les organes cérébraux, comme si on en ignorait la destination. C’est le meilleur moyen de se décider avec toute liberté, quand on aura rencontré un de ces caractères qui répondent à une manifestation d’un mode quelconque d’intelligence. Tous les savants physiologistes qui ont eu la gloire d’arriver a des découvertes remarquables n’ont jamais procédé autrement. L’anthropologie physiologique ne saurait abandonner cette méthode sans verser, involontairement ou non, dans l’ornière des hypothèses ou Gall et Spurzheim dameront toujours le pion aux Flourens et aux Gratiolet. Même un Claude Bernard, malgré toute la sagacité qu’il déployait dans les recherches expérimentales, donnant la preuve d’une sûreté de vue et d’une activité d’esprit rares dans le monde scientifique, perdrait absolument son prestige si, au lieu d’étudier la nature comme une grande inconnue qu’on tâche de dévoiler respectueusement et délicatement, il abordait les organes dont il voulait étudier les fonctions avec l’idée tlxe d’y trouver la confirmation d’une doctrine ou d’un système quelconque. « L’idée systématique, dit le grand physiologiste, donne a l’esprit une sorte d’assurance trompeuse et une inflexibilité qui s’accorde mal avec la liberté du doute que doit toujours garder l’expérimentateur dans ses recherches. Les systèmes sont nécessairement incomplets ; ils ne sauraient jamais représenter tout ce qui est dans la nature, mais seulement ce qui est dans l’esprit des hommes[1]. » Paroles profondes ! On pourrait les appliquer non-seulement aux dé-

  1. Cl. Bernard, La Science expérimentale.