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rieur au second pour qu’elle devienne le plus spécieux des paralogismes. En effet, l’homme ne justifie sa domination sur les autres êtres de la création que par le sentiment qu’il a de sa supériorité, surtout intellectuelle et morale, sur tout ce qui vit et s’agite sur la surface du globe.

Hors de ce sentiment qui a pris dans nos consciences l’importance d’un fait indiscutable, planant au-dessus de toute démonstration, il faudrait bien considérer comme des actes de pure violence, l’usage arbitraire que nous faisons de tous les animaux, au gré de nos besoins. — Le fier lion que nous cherchons à détruire dans l’impossibilité ou l’on est de le soumettre, léléphant gigantesque que nous dressons à notre usage, ne sont-ils pas aussi les rois du désert ou des forêts humides ? Le poisson, dont nous alimentons nos estomacs délicats, n’est-il pas encore le roi des océans à l’onde amère ? Si, parce que tous ces êtres ont un domaine qui leur est propre, il fallait les respecter, ne pas en disposer suivant nos besoins, ne pas nous reconnaître des droits sur eux, tout progrès deviendrait irréalisable. L’humanité, au lieu de dominer le reste de la nature, se serait condamnée à un étroit scrupule ou toute personnalité et toute énergie auraient disparu.

Nous n’usons et n’abusons donc de tous les êtres de la création que par la conviction intime et profonde que nous avons de leur être supérieurs, ayant à réaliser une destinée d’une précellence incontestable, lorsqu’il s’agit de la comparer à leur chétive existence. Ce point de philosophie est d’une vérité irréfragable. Pour en offrir une preuve sensible, il suffit d’une réminiscence historique.

Dans les premiers temps du prosélytisme chrétien, les nouveaux convertis se sentaient pris d’un tel délire d’humilité que, bien souvent, leur idéal le plus élevé était de s’anéantir individuellement, afin de se mieux confondre dans l’ineffable unité de l’Église naissante. Cette interpré-