Page:Finot - La Marche à la lumière, Bodhicaryavatara, poème sanskrit de Cantideva.djvu/16

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pas là de place pour deux ; Târâ l’arrosa d’eau chaude en lui disant : « La royauté est l’eau bouillante de l’enfer : c’est cette eau qui servira à ton sacre. » Obéissant à ces avertissements, il s’enfuit de la capitale et s’enfonça dans la jungle. Un jour il rencontra une femme qui lui donna à boire une eau délicieuse et le conduisit à un yogi qui lui enseigna l’art de la méditation extatique : il reconnut bientôt en eux ses protecteurs Târâ et Mañjuçri. Il arriva dans la contrée de l’Est et devint ministre du roi Pañčamasiṃha ; comme signe de sa dévotion à Mañjuçri, qui a pour attribut le glaive, il portait une épée de bois. Les autres mandarins, jaloux de lui, persuadèrent au roi que son ministre était un fourbe et que son épée n’était pas de bois, comme il le prétendait. Pour s’en assurer, le roi lui ordonna de la tirer du fourreau. Le ministre l’avertit qu’il aurait à s’en repentir. Le roi s’obstina : il consentit pourtant à fermer l’œil droit et fit bien, car l’épée nue jeta un tel éclat que l’œil gauche tomba.

Le roi tout contrit fit ses excuses au dangereux porte-épée. Mais celui-ci était dégoûté de la vie des cours : il partit pour le Madhyadeça où il reçut l’ordination sous le nom de Çântideva. Pour mystifier ses frères, il se donna l’apparence d’un moine glouton et paresseux. Mais quand son tour vint de réciter les Sûtras, devant la communauté