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Pierrette chantait sans savoir pourquoi. Les premiers rayons plus ardents éveillaient en elle un renouveau de vie. Elle aurait sauté de joie à la seule vue des oiseaux voletant autour de sa fenêtre, et de la neige s’évanouissant sous les caresses trop vives de la lumière.

Depuis le matin elle courait par la maison. Deux fois déjà elle était allée jusqu’à la chambre de sa mère, et s’était retirée sans oser frapper jugeant qu’il était trop tôt. Le facteur avait déposé dans la boîte une lettre à l’adresse de celle-ci. Elle supplia Yvonne :

— Allez la porter tout de suite. Si maman n’est pas éveillée, allez sur la pointe des pieds et déposez-la sur sa table de chevet.

Quand elle disait vous à Yvonne, c’est qu’elle lui demandait quelque chose qui lui tenait bien fort au cœur.

Elle ne voulait pas l’avouer, mais cette lettre, elle en attendait du bonheur.

Yvonne porta le déjeuner dans la chambre de sa maîtresse qui ne fit pas appeler Pierrette. Celle-ci s’était dit : « Si la missive me concernait, depuis longtemps maman m’en aurait prévenue. »

Au dîner, Madame des Orties se présenta l’air soucieux.

— Avez-vous reçu de mauvaises nouvelles ? demanda Pierrette, profitant de l’une des absences d’Yvonne.

— Non, ma Pierrette, pas précisément, c’est la demande en mariage de Guy de Morais. Tu ne peux pas savoir jusqu’à quel point il m’en coûte de te demander ton avis à ce sujet. Je suis si certaine que tu diras : oui.

Yvonne revenait portant le dessert, Pierrette n’ajouta rien aux dernières paroles prononcées par sa mère malgré son ardent désir de savoir.

Assise dans la chaise longue du boudoir, elle attend maintenant que la conversation interrompue reprenne où elle en était restée.