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des chansons simples et badines, souvenirs de ses jeunes années, des mélodies plus graves, aux accompagnements compliqués, elle a même essayé quelques chants populaires : « Ne fais jamais pleurer ta mère, L’amour, toujours l’amour, Kiss me good night ».

Puis elle s’est levée à bout de souffle, et est venue embrasser sa mère ; lentement elle s’est laissée glisser sur un pouffe, et a enfoui sa tête dans les plis de la robe de satin noir.

Comme Pierrette n’est pas coutumière de ces démonstrations de tendresse. Madame des Orties sent toute la désespérance de ses mouvements.

Elle prend dans ses mains la tête de son enfant et dit :

— Nous sortirons ce soir, mignonne, il y a longtemps que je ne suis allée au théâtre, tu m’y conduiras, l’auto est en ordre.

— Oui, certainement, acquiesça-t-elle.

Pierrette est assise devant son secrétaire, elle barbouille du papier, avec rage, elle le met en boule, et le lance au panier.

Elle vient de recevoir de Charlie une lettre de reproches et de plaintes. Elle porte d’autant plus, cette lettre, que Pierrette dans son for intérieur, se fait depuis quelque temps les mêmes semonces. D’un autre côté, plus elle s’interroge, moins elle se sent disposée à lier sa destinée à la sienne. Elle ne se fait plus illusion, ce qu’elle ressent à l’égard de Guy de Morais c’est : l’amour. Mais comment expliquer à Charlie ce revirement ? Sait-elle au juste comment cela s’est passé ? Quand elle s’était éveillée, il était trop tard, le désastre était irréparable. À force de remuer ces pensées dans sa tête, elle devint très nerveuse.

Elle finit par lui écrire quelque chose de pas très explicite, au milieu de tout ce désordre de mots, il devait comprendre qu’elle lui offrait de reprendre tous les cadeaux qu’il avait bien voulu lui faire, aussi qu’elle tenait l’automobile à sa disposition. Ce qui voulait