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plein vingtième siècle est-il permis de s’appeler « Charles » ?

En deux mots tout est réglé.

Ensemble, ils iront à la première représentation au théâtre, ensuite au restaurant ; ensemble ils reviendront à petits pas si le temps reste au beau, en auto, si le temps tournait à la pluie.

Pierrette regagne sa chambre.

Charlie est arpenteur, et doit partir prochainement pour un long voyage. La jeune fille le sait et elle se dit : « peut-être, ce soir, m’annoncera-t-il son départ ? » Autrefois, ils l’impressionnaient désagréablement ces absences, ces séparations plus ou moins longues : mais cette fois, ce lui est presque un soulagement. Dans quelques jours, il lui arrivera des parents et des amis en visite, elle sera plus libre. Ce pauvre Charlie, ce qu’il est vieux jeu ! il ne lui laisse pas une minute de répit. Pourtant, ce soir, elle se mettra belle afin de lui plaire une dernière fois.

Elle ouvre la garde-robe, inspecte, et se saisit d’une robe ivoire. Elle se rappelle qu’il lui en a fait plusieurs fois compliment.

Sa robe pâle, son manteau sport, un tout petit chapeau.

Charlie n’est jamais en retard ; elle glisse ses longs gants.

Charlie est là.

— Pierrette, ce soir, nous prenons l’auto.

Elle est un peu surprise. L’auto appartient à Charlie, c’est bien vrai, mais il la laisse ordinairement libre de s’en servir à son gré.

Elle réplique aussitôt :

— Va la chercher, voici la clef.

Deux minutes après, c’est Pierrette qui est au volant.

Comme elle a l’air crâne ! pense Charlie qui l’admire.

Et Pierrette s’en amuse.