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lons de la société ; pauvre, elle apprendrait à juger la valeur des amitiés mondaines.

Après avoir souhaité une bonne nuit à sa mère, elle se retira dans la salle à manger. Elle avait eu le temps de prendre une décision depuis l’arrivée de son amie. Elle donnerait sa parure de diamants. Comme elle était d’une valeur inestimable, elle irait elle-même la porter au Père qui la ferait râfler.

Elle n’avait pas pris cette détermination sans qu’il lui en coûtât. D’un autre côté, comme l’avait si judicieusement remarqué son amie, elle était généreuse. Cette parure ne pouvait plus lui être d’aucune utilité. Aurait-elle jamais l’occasion de la porter ? Et si oui, ne serait-elle pas déplacée dans la chevelure d’une jeune fille obligée de travailler pour gagner sa vie ?

La conserver, en souvenir de l’ingrat qui l’avait abandonnée, juste au moment où elle aurait eu le plus besoin de quelqu’un pour l’aider, quand elle se trouvait sans défense aux prises avec la vie ? Elle n’y tenait pas plus que cela.

Elle avait écrit à son cousin Benoît, à New-York, et lui avait exposé leur ruine sans ne rien lui cacher du désastre, elle racontait également la défection de son ami sans un mot amer pour celui-ci. Elle semblait être fataliste, et se consoler en se disant qu’il était écrit que les choses se passeraient ainsi. Ce n’était pas son idée au fond, mais elle considérait comme une grande grâce d’avoir pu découvrir avant son mariage, ce côté si petit de cet homme qu’elle jugeait maintenant indigne d’elle. Elle lui avait aussi fait part de sa nouvelle vie, et ne se plaignait pas de son travail.

La réponse ne se fit pas attendre : « Viens, Pierrette, nous ne sommes que des garçons à la maison, maman a toujours dit qu’elle aimerait voir une fille au milieu de nous, Viens donc, cette chère maman, tu lui tiendras compagnie, nous sommes si souvent au dehors. »

Pierrette répondit aussitôt à cette bonne lettre. Elle remerciait sa tante et ses cousins de leur gentillesse, dont elle n’avait jamais douté : si pour le présent, elle