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boursé, si elle veut en retirer une somme qui en vaille la peine.

Elle pose quelques questions discrètes sur ce qu’elle peut attendre de leur appui, si elle se voit acculée à l’obligation de travailler.

Tous se récusaient, alléguant qu’elle pourrait fort bien sortir de cette impasse sans avoir recours à cette dernière solution.

Le lendemain Pierrette s’adressa elle-même aux journaux, fit insérer : « Propriété à vendre », jugea les détails de l’annonce ; acheta une pancarte et vint demander à Yvonne de l’afficher à la devanture de la maison.

La pauvre était atterrée :

— Mais c’est impossible ! Mademoiselle, c’est impossible !

— Entendez-vous ? Yvonne, il faut placer cette affiche ; allons, obéissez tout de suite.

La bonne dévouée regrette d’avoir déplu à sa jeune maîtresse, se confond en excuses, et se dirige bien à regret vers la porte, en répétant entre ses dents : « Misère de misère. »

Le souper fut lugubre. Madame des Orties se sentait bien faible, mais de peur d’effrayer son enfant et de lui alourdir le fardeau en se montrant si peu vaillante, fit effort pour descendre à la salle à manger, mais elle eut un éblouissement en se mettant à table. Elle tourna sur elle-même, et n’eut été la présence d’esprit de Pierrette qui appela Yvonne, la soutenant de toutes ses forces, en attendant de l’aide, elle tombait. Ce ne fut qu’une petite alerte, sans suite grave. Après une bonne nuit de repos obtenue au moyen d’un remède efficace, Madame des Orties se sentait mieux.

Le soir de ce jour si fertile en péripéties, les nerfs de Pierrette avaient subi une trop forte tension, renfermée dans sa chambre jaune, la tête enfouie dans un coussin pour étouffer ses sanglots, sans pensée, elle pleura longtemps. Ce moment de faiblesse était bien