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tement devant la dame, et énumère par habitude la valeur et les particularités du contenu. Elle se sent détaillée par le joli brun qui stationne tout près. Dans une minute il lui parlera, il commandera : « de la violette ou du muguet, Mademoiselle. » Et elle songe : je connaîtrai le son de sa voix. Enfin la cliente a fixé son choix et s’éloigne avec son acquisition. Le salut et le sourire d’adieu de l’employée pour la dame qui se retire, s’adressent en même temps au jeune homme qui se rapproche. Tandis qu’elle évoluait gracieuse sous les reflets trop crus des ampoules nombreuses, il l’avait examinée entre ses cils rapprochés. Tout près d’elle maintenant, il baisse les yeux comme s’il était ébloui par cette beauté lumineuse, et demande d’une voix douce et un peu voilée :

— Je voudrais du parfum, s’il vous plait, Mademoiselle.

— Quelle marque et quel arôme préférez-vous, Monsieur ?

Tout en parlant, elle avait levé vers lui ses grands yeux et ses cils avaient battu.

— Est-ce que je sais ? ajouta-t-il. Voulez-vous avoir l’obligeance de me laisser voir quelques échantillons.

C’était vrai, pour le moment, il avait oublié jusqu’au nom du parfum dont il se servait tous les jours. Seul, un grand flot de tendresse montait en son cœur pour cette étrangère qui était là devant lui. Est-il permis d’être aussi idéalement belle ?