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Elle ne voulait rien laisser soupçonner à cet étranger. Les chauffeurs font les courses les plus extravagantes et ne parlent pas, d’un autre côté, ils ne se gênent pas non plus pour tirer leurs conclusions. Elle comprenait qu’il valait mieux ne pas paraître surprise, et jouer au Monsieur et à la Dame qui reviennent chez eux, après des courses en ville.

Alexandre gravit les quelques marches, poussa la porte et s’effaça pour livrer passage à Laure. Elle se trouva dans un large corridor, et de chaque côté des portes si semblables qu’il devait être facile de s’y tromper, mais elles étaient numérotées comme à l’Ave Maria.

La concierge était là et dévisageait la si belle fille qui accompagnait son locataire. Elle était surprise, elle l’avait toujours connu si rangé, et jamais non plus elle ne permettrait que l’on portât préjudice à la bonne réputation de la maison.

Alexandre avait deviné tout de suite les idées qui se pressaient derrière le chignon serré, les bandeaux gris de la concierge, il la toisa dédaigneusement des pieds à la tête, et lui dit d’un ton acerbe :

— Trêve de supposition, il est de votre intérêt de me garder. Vous ai-je jamais donné l’occasion de me mal juger ? J’amène ma sœur qui s’est trouvée mal et ne peut regagner seule sa pension dans cet état. Donc, tenez votre langue, sans quoi vous aurez affaire à Alexandre Daubourge.

Un sourire d’incrédulité courut sur les lèvres de la vieille femme, comme elle y croyait à cette