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— Maman, donnez-moi une raison et je vous dirai si j’accepte de faire ce sacrifice. Mais est-ce une raison de me réitérer : « Tu ne peux épouser Alexandre Daubourge. »

La mère secoue sa vieille tête :

— Comme tu es entêtée… comme lui…

Et Laure pense : « Elle fait allusion à mon père. »

Toute la soirée s’est passée à poser les mêmes questions, amenant les mêmes réponses. Puis ces courts instants de conversation, sont coupés de long silence. Ni l’une ni l’autre n’ont pris de nourriture, ni l’une ni l’autre ne pensent au sommeil.

Maintenant Laure est assise au pied du lit, Madame Lavoise sur la chaise. Elles sont toutes deux silencieuses, ayant épuisé, l’une ce qu’elle avait à dire, l’autre, les arguments propres à gagner sa cause, et Laure découragée pense : Je croyais connaître un peu maman, je croyais au moins qu’elle m’aimait. Quelle folie de se leurrer de telles chimères ? Nous sommes des étrangères. Comment voulez-vous qu’il y ait entre nous autre chose que les liens du sang.

Et Madame Lavoise se levait, elle venait tout près de Laure, caressait ses cheveux blonds bouclés, en désordre, et répétait :

— Laure, ma petite Laure, ne résiste pas à mes conseils, rends-toi tout de suite ou tu seras bien malheureuse.

Laure fait signe de la tête. Elle ne comprend pas, elle ne peut comprendre, et sa mère refuse de s’expliquer davantage.