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pour Laure. Elle a dit, avec des larmes dans ses yeux bleus si doux : « Si tu savais comme Laure est triste, et certainement sa santé est compromise. » Quand je veux m’intéresser à elle, elle dit toujours : « Je suis très bien, ne vous tourmentez pas Lucille, je vous ai déjà causé assez de tourments. »

Pour la première fois peut-être, il la regarde avec des yeux qui savent voir. Sa pâleur le frappe, ses épaules s’affaissent, son sourire se fait très rare. Il la surveille, avec quelle lassitude elle s’occupe dans la chambre, elle place et déplace inutilement les objets, ne se mêle pas du tout à leur conversation, dans son grand désir de ne pas les surveiller ; elle se prépare à sortir. Alors seulement Alexandre lui adresse directement la parole :

— Laure où vas-tu ?

— À l’église, répond-elle.

Quand elle avait pris son chapeau, elle n’avait nulle idée d’une promenade quelconque. Elle s’était dit : « je marcherai au hasard. » La question d’Alexandre, qu’elle n’avait pas prévue, demandait une réponse. Elle avait choisi celle qui devait le moins intriguer les deux amis.

Alexandre, capable de comprendre que c’est encore l’endroit où elle trouvera la meilleure consolation dans sa souffrance inguérissable, ne s’interpose pas, il dit simplement :

— Ne sois pas trop longue, nous t’attendons pour sortir.

— Si je tarde, ne m’attendez pas.