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J’ai jeté un coup d’œil rapide sur la carrière scientifique de M. Théron de Montaugé, il me reste à vous rappeler l’homme privé tel que je l’ai connu, tel que l’ont apprécié tous ceux qui ont eu avec lui de fréquents rapports.

M. Théron de Montaugé, doué d’un caractère ferme, apportait dans l’exécution de ses projets cette ténacité particulière aux hommes dont les convictions sont profondes et sincères. Son langage était vif, ardent, presque passionné. On eût cru parfois, en l’entendant prendre part à des discussions d’intérêt public ou d’intérêt scientifique, avoir devant soi un homme d’un caractère irritable, emporté, volontaire, et pourtant il n’en était rien, car son caractère était doux, bienveillant, et s’il fut passionné ce fut toujours pour accomplir de bonnes actions.

Son désintéressement n’avait pas de bornes ; en 1872, on le vit, quand la péripneumonie qui sévissait sur l’espèce bovine fit irruption dans ses étables, sacrifier 44 animaux de choix pour préserver ses voisins du fléau dont il était victime.

M. Théron de Montaugé fut pendant longtemps président du Comité de secours de son quartier et il s’acquitta de cette fonction de la manière la plus délicate et la plus honorable. Combien de fois ne l’a-t-on pas vu, accompagné de ses deux enfants, visiter les malades de la paroisse et leur apporter à la fois des secours et des consolations ! Sa bienveillante sollicitude suivait les pauvres partout. Il contribua pour eux à la fondation des Sociétés de secours mutuels, d’écoles, de bibliothèques, etc.

L’amélioration du sort des classes pauvres au milieu desquelles notre existence s’écoule est, écrivait-il, l’œuvre privilégiée de notre vie, celle à laquelle nous avons voué la meilleure part de ce que Dieu nous a départi d’activité, d’intelligence et de fortune.

Aussi, quand une mort imprévue est venue le frapper, il a été facile de comprendre, en voyant toute la population du faubourg Bonnefoy se presser autour de son cercueil, il a été dis-je, facile de comprendre que le deuil qui atteignait sa famille était aussi un deuil public.

Quatre ou cinq jours avant sa mort, il était venu me voir accompagné du fils de l’un de ses amis. Il attendait lui-même