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ment de l’Union prit enfin la résolution de munir sa flotte d’engins offensifs, analogues à ceux des Confédérés. Il commanda un bateau-torpille, qui fut désigné sous le nom de screnpicket boat, et il le mit à la disposition du capitaine Cushing, avec mission d’attaquer le cuirassé confédéré l’Albemarle.

L’Albemarle était un croiseur qui était devenu la terreur des passes maritimes. Son capitaine se vantait de couler tous les navires de l’Union, et on l’avait vu sortir victorieux de deux engagements très rudes. Décidé à détruire ce dangereux adversaire, le gouvernement de l’Union chargea de cette mission périlleuse le capitaine Cushing. Ce courageux marin, accompagné de treize hommes résolus, appareilla, dans la nuit du 26 octobre 1864, pour aller à la rencontre de l’Albemarle, alors mouillé dans le Roancke River. Il s’en approcha, d’abord lentement, silencieusement, mais bientôt, découvert et accueilli par un feu de mousqueterie formidable, il lança à toute vapeur son bateau en avant, porta sa torpille sous le flanc du navire, et lâcha la détente.

L’Albemarle sauta en l’air. Le bateau torpilleur fut détruit, mais le capitaine Cushing put se sauver, à la nage, avec quelques-uns de ses compagnons.

Tels furent les débuts des torpilleurs dans la guerre maritime. Les procédés employés par les confédérés et les fédéraux étaient encore élémentaires, mais l’art de la destruction n’en avait pas moins fait un grand pas : le navire torpilleur était créé.

Quant à la torpille elle-même, son invention remontait beaucoup plus haut, mais jusque-là on n’avait pas songé à la placer sur un bateau ou un navire, pour en faire un moyen d’attaque ou de destruction. Son emploi se bornait à la défense des fleuves, des ports et de certains points du littoral où l’ennemi pouvait tenter un débarquement de vive force.

Avant d’étudier les navires torpilleurs, leur construction, leur armement, leur tactique, il est donc indispensable de parler des torpilles.

Fig. 263. — Fourneau submergé de Fulton, d’après une gravure du temps.

Deux ingénieurs américains, Bushnell et Fulton, sont les inventeurs de la torpille. Dans notre notice sur les Bateaux à vapeur des Merveilles de la science[1], nous avons parlé de Bushnell, et dit que Fulton avait proposé, en 1803, au premier consul Bonaparte, de construire, à l’entrée de nos ports, ce qu’il appelait des fourneaux submergés.

Le fourneau submergé de Fulton se composait, comme le représente, d’après une gravure du temps, la figure 263, d’une boîte en cuivre, B, fixée à une boîte de sapin, A, contenant 100 kilogrammes de poudre, et retenue par un câble, permettant à la torpille

  1. Tome I, pages 185-186.