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lumineux, longs et courts, on établit un système de correspondance télégraphique.

Malheureusement la limite de visibilité de cette lumière n’a été trouvée que de 48 kilomètres. Il faudrait un foyer extraordinairement puissant pour que la lumière, répartie sur la surface entière du ballon, et forcée de traverser le voile opaque de l’enveloppe, pût porter beaucoup plus loin.

On réussirait mieux en attachant le foyer lumineux au-dessous du ballon. Ce que la lumière perdrait en surface, elle le regagnerait en puissance.


Il nous reste à signaler d’intéressants essais d’application des aérostats à la marine. Pendant l’été de 1888, l’escadre d’évolution, en rade de Toulon, fit l’expérience de l’emploi des ballons pour l’observation des mouvements d’une flotte ennemie. On voulait établir, à bord des bâtiments d’escadre, des observatoires volants, destinés à découvrir les mouvements de l’ennemi, et surtout se garer des attaques des torpilleurs, qui perdraient leur dangereux incognito devant ces vigies pouvant s’élever à des hauteurs qui défient l’altitude de la tour Eiffel.

Un des usages auxquels les ballons marins captifs seront également employés avec un grand avantage, c’est la surveillance des mouvements de l’ennemi dans les terrains avoisinant les côtes.

La vigie placée dans le ballon observateur rendrait compte de ses observations à son point d’attache, par un téléphone partant de sa nacelle et allant aboutir au navire où se trouve le récepteur téléphonique.


En vue des expériences dont nous allons parler, le port de Toulon avait commencé par envoyer à l’établissement aéronautique de Meudon-Chalais une équipe de marins, commandés par M. le lieutenant de vaisseau Serpette, qui s’était fait le promoteur de cette intéressante entreprise.

Les marins saisirent vite la pratique des manœuvres aérostatiques, et furent ainsi en mesure de guider leurs camarades de l’escadre. Ils repartirent pour Toulon, et une commission fut chargée de suivre les expériences.

Le matériel destiné à ces essais en mer sortait des ateliers militaires de l’École de Meudon-Chalais, et ne différait que par quelques points de détail du matériel usité dans l’armée. Un des officiers de cette école, le capitaine Jullien, faisait partie de la Commission.

Le 12 juillet 1888, des essais de gonflement furent effectués sous la direction de M. le lieutenant de vaisseau Serpette, et en présence d’un grand nombre d’officiers de l’escadre, à bord de la batterie flottante l’Implacable. L’opération ayant parfaitement réussi, quelques ascensions captives furent reprises le 17 juillet. Un seul observateur était dans la nacelle, à portée du téléphone qui établissait les communications verbales entre l’aérostat et le navire. Un temps calme favorisait l’ascension.

Nous emprunterons à un journal de Paris le récit détaillé de ces expériences intéressantes.


« Le ballon, dit ce journal, à la date du 19 juillet 1888, s’élève majestueusement à 350 mètres environ d’altitude. À ce moment, 7 heures 40, le capitaine transmet par le téléphone le commandement tiens bon, et l’aérostat s’arrête.

Les curieux envahissent le quai du port. M. le lieutenant de vaisseau Serpette scrute alors l’horizon, à l’aide d’une puissante lunette, il examine attentivement les points les plus éloignés, au sud la Corse, à l’est Nice et à l’ouest Marseille, et si la défense l’exigeait, il signale au commandant de Mongret, qui se trouve alors avec la Commission sur le pont de l’Implacable, tout ce qui peut être remarqué du haut de cet observatoire.

Il énumère le nombre de navires à vapeur ou à voiles qui naviguent en ce moment à l’est, à l’ouest ou au sud de Toulon. Il indique même la nationalité du plus grand nombre, et répond à différentes questions qui lui sont posées par la Commission.

Sur un ordre du capitaine, le ballon descend à 8 heures trois quarts et remonte dans les airs à 9 heures avec le même succès. Cette fois,