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Bruxelles. Il s’était élancé d’une grande hauteur ; mais il était tombé lourdement, quoique sans se faire de mal, et la foule, mécontente, avait mis son appareil en pièces.

Cependant, le 29 juin 1874, l’expérience réussit à Cremorn-Garden, à Londres : Degroof s’éleva dans un ballon, conduit par M. Simmons. L’aérostat se dirigea jusqu’à la hauteur de Brandon, dans le comté d’Essex. Là, l’intrépide mécanicien fut livré à lui-même et lancé dans l’espace. Il descendit lentement, et toucha terre assez heureusement.

Mais une seconde expérience, tentée le 9 juillet, en présence de la foule, devait lui être fatale. Le ballon s’éleva lentement ; pas un souffle d’air ne venait contrarier sa marche ; l’appareil était en bon état, et Degroof avait fait ses adieux à sa femme, plein de confiance, en lui disant : « Au revoir ! »

À un quart de mille de Cremorn-Garden, au-dessus de Roben-Street, le ballon se rapprocha de terre. Simmons crut le moment venu d’abandonner l’homme-volant à ses propres ailes. On était près d’une église : « Je vais descendre dans le cimetière, » cria Degroof, en s’abandonnant à son appareil.

Il ne disait que trop vrai !

À quatre-vingts pieds de terre, devant des milliers de spectateurs, au lieu de s’abattre doucement, les ailes déployées, l’appareil tourna sur lui-même, ses ailes ne prenant plus le vent, et le malheureux Icare vint se briser sur une tombe.

Il était sans connaissance, mais respirait encore. Transporté à l’hôpital, il mourut en y entrant.

La foule, ignorant ce qui venait de se passer, mit l’appareil en pièces, avant que la police eût le temps de l’en empêcher.


Nous arrivons à la catastrophe du Zénith, qui priva les sciences d’observation de deux intrépides et intelligents investigateurs et qui produisit, dans le monde scientifique, comme dans le monde étranger aux sciences, une douloureuse sensation.

Avant d’en commencer le récit, nous exprimerons un regret et un reproche. La catastrophe du Zénith fut causée certainement par un défaut de précautions. Une imprudence excessive avait présidé aux préparatifs d’une ascension faite dans le but, bien arrêté d’avance, de s’élever aux plus hauts sommets de l’air. L’expérience se faisait, non seulement sous l’inspiration de l’Académie des sciences de Paris, représentée par l’un de ses membres, mais encore sous les auspices d’un professeur du Collège de France, Paul Bert. Le programme des opérations à exécuter avait été tracé avec précision aux explorateurs, et ce programme se rapportait à des déterminations météorologiques à faire dans les plus hautes régions qu’un aérostat pût atteindre. Et c’est à peine si l’on avait songé à assurer la respiration des navigateurs aériens dans les régions d’une altitude extrême ! Trois petits ballons de caoutchouc, contenant 70 pour 100 d’oxygène, et 30 d’air, capables d’entretenir la respiration pendant une heure au plus, voilà ce qu’emportaient les voyageurs. N’aurait-on pas dû songer, non seulement à les munir d’une plus forte proportion de gaz respirable, mais encore à rendre, au moyen d’une espèce de masque posé devant la bouche, la respiration de l’oxygène automatique, forcée, pour ainsi dire ? On avait donc oublié combien est dangereux, foudroyant, l’arrêt subit de la respiration ! — On n’avait donc pas lu dans l’ouvrage de MM. Glaisher, Fonvielle et Gaston Tissandier, les Voyages aériens, le récit de l’ascension de Glaisher et Coxwell, dans laquelle M. Glaisher manqua de perdre la vie, après avoir dépassé l’altitude de 8 000 mètres, et ne dut son salut qu’à un miraculeux hasard ! On sait qu’arrivé à cette hauteur, M. Glaisher tomba subitement sans connaissance, au