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valeur, c’est que rien n’est resté, du moins jusqu’à ce moment, des nombreuses expériences faites dans cette direction, depuis 1870, car jamais le public n’a été mis en mesure d’en connaître l’existence. La raison en est, ainsi que nous l’avons dit au début de ce chapitre, qu’il faudrait un moteur marchant avec une vitesse inouïe, pour élever en l’air, y maintenir et y diriger un appareil lourd. Or, ce moteur merveilleux, ce phénix de la mécanique, n’a jamais été vu que dans les aspirations et les rêves des partisans du plus lourd que l’air.

Le système du plus lourd que l’air est donc aujourd’hui en défaveur, et nous ajouterons en juste défaveur. Est-il raisonnable de rejeter, sans nécessité, le merveilleux moyen que nous offre l’art des Montgolfier de nous élever de terre et de flotter dans les airs, sans dépense, ni appareil compliqué, grâce au seul emmagasinement d’un gaz providentiellement léger : le gaz hydrogène ?




CHAPITRE VIII

les drames aériens.

Nous avons consacré, dans notre Notice sur les Aérostats, des Merveilles de la Science, un chapitre à retracer les accidents et les malheurs qu’ont amenés à leur suite beaucoup de voyages aériens. Les ascensions, soit dans un but de réjouissance publique, soit dans un intérêt scientifique, s’étant beaucoup multipliées depuis 1870 jusqu’à ce jour, il est facile de comprendre que le nombre des victimes de l’aérostation se soit notablement accru. Nous enregistrerons, dans ce Supplément, les récents désastres survenus dans les plaines de l’air, par l’imprudence des aéronautes, ou par des circonstances imprévues et fatales.

On a lu, dans l’histoire des ballons-poste du siège de Paris, le récit de plusieurs événements tragiques survenus aux courageux aéronautes qui franchissaient, au haut des airs, les lignes ennemies. La perte du ballon la Ville d’Orléans, qui atterrit en Norvège, après un voyage si émouvant, la mort du matelot Prince et d’autres aéronautes du siège, ont marqué de tristes épisodes dans l’histoire de l’aérostation moderne. Cette lugubre série s’est continuée par les événements qu’il nous reste à raconter.


Duruof était un aéronaute qui, dans les premiers temps de l’investissement de Paris, s’était empressé de réparer un vieux ballon qui lui appartenait, le Neptune, pour le mettre à la disposition du gouvernement. M. Nadar installa ce ballon sur la place Saint-Pierre, à Montmartre, et s’en servit pour faire quelques ascensions captives.

Nous avons dit que Duruof fut le premier aéronaute qui partit de Paris, pendant le siège. Le 23 septembre 1870, il s’élevait de la place Saint-Pierre, emportant 125 kilogrammes de dépêches, et il accomplit heureusement sa mission ; car il descendit près d’Évreux, avec tout son bagage.

À Tours, par l’ordre du gouvernement de la Défense nationale, il construisit, avec l’aéronaute Mangin, un ballon de soie, qui était destiné à des ascensions captives pour les opérations de l’armée de la Loire. Ce ballon, qui avait reçu le nom de la Ville de Langres, resta sans emploi, le désarroi de la campagne ayant rendu ses services inutiles.

C’est le 31 août 1874, pendant les fêtes de Calais, que Duruof essaya de franchir la Manche, pour passer de France en Angleterre, à l’imitation de Blanchard, qui avait effectué ce tour de force en 1812. Sa femme, qui l’accompagnait, n’était jamais montée en ballon. L’ascension du 31 août était son voyage de noces, voyage qui fut fort accidenté, comme on va le voir.

Le vent était contraire pour passer de