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quer de front la question de l’application de la vapeur à l’aérostation.

Il faut chercher à disposer le foyer de manière à ne pas mettre le feu au gaz combustible renfermé dans l’aérostat. Le moyen est difficile, sans doute, mais il n’est pas au-dessus des ressources de l’art, puisque, nous le répétons, l’intrépide Giffard traversa les airs dans un ballon poussé par une machine à vapeur. Si l’on continue à faire promener dans les airs, pendant une après-midi, des ballons dirigeables électriques, on amusera les badauds, mais on ne fera pas avancer la question d’un pas.

C’est une véritable déception que l’on se prépare, en persévérant à faire usage, pour naviguer dans l’atmosphère, du moteur dynamo-électrique, dont la puissance est si médiocre et si peu durable. Il faut trouver un moteur réunissant la puissance et la durée.


Cette vérité commence à être comprise, non en France, où les directeurs de l’usine aérostatique militaire de Meudon persistent à faire usage du moteur électrique, et par suite de cette erreur, ne font pas le plus petit progrès, et ont cessé d’occuper l’attention publique, mais bien à l’étranger. En Russie, on paraît s’occuper sérieusement d’appliquer la machine à vapeur à la propulsion des aérostats. Le général Boreskoff a fait construire, en 1888, par M. Gabriel, aéronaute de Paris, un ballon dirigeable à vapeur, d’après le système proposé par cet ingénieur-aéronaute. Les travaux sont exécutés à l’ancienne usine Flaud, au Champ de Mars, où l’on a élevé un hangar pour abriter l’appareil pendant la durée du gonflement et les expériences d’essai, qui seront exécutées à Paris avant de l’être à Saint-Pétersbourg.

Pendant l’été de 1886, les aéronautes militaires russes ont tenté des ascensions à Cronstadt, avec un aérostat réalisant à peu près les conditions données par le général Boreskoff. Le Times a même raconté qu’un de ces voyages faillit avoir un fâcheux dénouement. Trois aéronautes partirent de Cronstadt, par un vent soufflant dans la direction du sud-est, qui les poussait vers la mer Baltique. Ils n’avaient, d’ailleurs, ni moteur, ni appareil de direction. Peu de temps après avoir passé au-dessus d’Orianenbourg, ils furent saisis par une brise violente du sud-ouest, qui les lança dans le golfe de Finlande, en même temps qu’un torrent de pluie et de grêle les inondait.

Par suite de la tourmente, les officiers russes tombèrent dans le golfe, à 19 milles au large de la côte d’Esthonie. Ils étaient perdus sans la présence d’un navire anglais commandé par le capitaine Crolls, qui accomplit leur sauvetage.


En Allemagne, on a proposé un aérostat mû par la vapeur, dont nous mettons la vue pittoresque sous les yeux de nos lecteurs (fig. 521).

« Le ballon à vapeur de M. Wolfert, dit M. S. de Drée, dans un article publié par le journal Science et Nature[1], diffère de celui des aéronautes français en ce que l’hélice de propulsion, au lieu d’être placée sous le ballon, est montée à l’avant dans un cadre en bois où elle reçoit directement du moteur à vapeur son mouvement de rotation.

« Le cadre du gouvernail se meut sur des pivots au moyen de cordages qui traversent le ballon, et sont mis en jeu par une manivelle placée dans la nacelle. Ces cordes passent à leur sortie dans des tuyaux extensibles, de façon à prévenir une déperdition de gaz. Le ballon, d’une longueur de 30 mètres, terminé en pain de sucre à ses deux extrémités, se compose d’une enveloppe de forte toile à voile, et, au lieu de filet

  1. 1885, tome IV ; page 321.